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Appelé à agir, le pape dénonce en Irlande des abus “répugnants”

Le Premier ministre irlandais Leo Varadkar s'est entretenu avec le pape François à Dublin. KEYSTONE/AP/GREGORIO BORGIA sda-ats

(Keystone-ATS) Le Premier ministre irlandais Leo Varadkar a rappelé samedi à l’occasion de la visite du pape François, que les blessures des abus sexuels commis par des prêtres contre des enfants n’étaient pas refermées. Le Vatican doit désormais passer de la parole aux actes.

“Les blessures sont encore ouvertes et il y a beaucoup à faire pour que les victimes et les survivants obtiennent justice, vérité et guérison. Saint-Père, je vous demande d’utiliser votre position et votre influence pour que cela se fasse ici en Irlande et dans le monde entier”, a déclaré Leo Varadkar à l’occasion de la visite du souverain pontife en Irlande.

“Nous devons à présent veiller à ce que les paroles soient suivies par des actes”, a-t-il insisté, lors d’un discours au château de Dublin aux côtés du souverain pontife. “Par-dessus tout, Saint-Père, je vous demande d’écouter les victimes”, a ajouté le Premier ministre alors que, depuis 2002, plus de 14’500 personnes se sont déclarées victimes d’abus sexuels commis par des prêtres en Irlande.

“Crimes répugnants”

Le pape lui a répondu que les Irlandais avaient toutes les raisons d’être en colère contre la défaillance de la hiérarchie ecclésiastique face à ces “crimes répugnants”. La communauté catholique toute entière en a “honte”.

Les dirigeants de l’Église catholique irlandaise sont notamment accusés d’avoir couvert des centaines de prêtres soupçonnés d’avoir commis des abus sexuels sur des milliers d’enfants pendant plusieurs décennies. “Je ne peux que reconnaître le grave scandale causé en Irlande par les abus sur les mineurs de la part des membres de l’Église chargés de les protéger et de les éduquer”, a commenté le pape,

Il a eu une pensée particulière aussi pour “les femmes qui dans le passé ont subi des situations particulièrement difficiles”. Plusieurs enquêtes ont notamment révélé l’ampleur des pratiques d’adoptions illégales d’enfants nés de femmes non mariées, réalisées par l’État irlandais avec la complicité de l’Église catholique.

François, qui effectue ce voyage en Irlande 39 ans après celui de Jean Paul II dans une société irlandaise en pleine sécularisation, a aussi encouragé la population à garder la foi. “Je prie afin que l’Irlande, tandis qu’elle écoute la polyphonie du débat politico-social contemporain, n’oublie pas les vibrantes mélodies du message chrétien”, a-t-il plaidé.

Emancipation

Signe de l’émancipation de la société irlandaise de la coupe de l’Eglise, le pays a légalisé en 2015 le mariage homosexuel, installé un Premier ministre gay, M. Varadkar, en 2017, et libéralisé, en mai, l’avortement.

“Nous avons voté dans notre parlement et par référendum pour moderniser nos lois – en comprenant que les mariages ne fonctionnent pas toujours, que les femmes doivent prendre leurs propres décisions et que les familles se présentent sous de nombreuses formes”, a déclaré le Premier ministre. “Saint-Père, je crois que le moment est venu pour nous de construire une nouvelle relation entre l’Eglise et l’Etat en Irlande”, a-t-il ajouté.

“S’appuyant sur notre histoire entrelacée et tirant les leçons de nos erreurs communes, il peut s’agir d’une religion qui n’est peut-être plus au centre de notre société, mais dans laquelle elle occupe toujours une place importante”, a-t-il dit.

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