Des perspectives suisses en 10 langues

Boko Haram – Le Niger proclame l’état d’urgence

(Keystone-ATS) Le Niger a proclamé mardi l’état d’urgence dans la région de Diffa (sud-est), à la frontière avec le Nigeria. Cette zone est sous le feu du groupe islamiste armé nigérian Boko Haram depuis cinq jours et la population fuit de crainte de nouvelles attaques.

Le gouvernement nigérien, réuni en conseil des ministres extraordinaire, a proclamé l’état d’urgence pour quinze jours à compter de mardi minuit. Cette mesure accordera des pouvoirs supplémentaires aux forces de sécurité, dont celui “d’ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit”, indique un communiqué lu à la radio nationale.

D’après les experts, Boko Haram dispose de “cellules dormantes” au Niger pour perpétrer des attaques. Diffa, capitale provinciale située à quelques kilomètres du Nigeria, a été attaquée vendredi à sa périphérie, puis dans son centre-ville dimanche et encore à deux reprises lundi.

Situation “dramatique”

Le ministre de la Défense nigérien Mahamadou Karidjo a déclaré que “la situation à Diffa” était “dramatique”, ajoutant que “les populations sont en train de quitter la ville”, dans une allocution lundi soir au Parlement, retransmise mardi par des radios privées.

Un rapport militaire nigérien a confirmé mardi l’hypothèse d’un attentat suicide contre un marché lundi. “Une femme kamikaze s’est fait exploser à côté d’un camion vers la douane, faisant six morts et de nombreux blessés civils”, peut-on lire dans le rapport. Un obus tiré depuis le Nigeria était déjà tombé dimanche sur le même marché.

Mardi matin, Diffa était une ville morte, a raconté un journaliste local à l’AFP. “Ca ne travaille plus: les services publics et privés, les écoles, tout est fermé”, a-t-il décrit.

Milliers de réfugiés

Ces “probables déplacements internes” ajoutent “une nouvelle problématique humanitaire” à “une situation déjà complexe”, a commenté Benoît Moreno, le porte-parole du Haut commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR) au Niger.

Le Niger accueille 125’000 réfugiés venus du Nigeria dans la région de Diffa, qui vivent dans des conditions “déplorables”, selon les Nations unies. “Pour des questions de sécurité, on a suspendu les interventions. On n’a plus accès aux réfugiés. On ne sait pas quelle est la situation à leur niveau”, a déclaré M. Moreno.

Inquiétude du PAM

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a lui aussi dû interrompre son aide à Diffa en raison des attaques menées par Boko Haram. Il “est particulièrement préoccupé par la violence des attaques au nord du Nigeria qui s’étendent au Niger, obligeant des milliers de personnes à fuir”, a affirmé la porte-parole de l’agence de l’ONU à Genève Elisabeth Byrs.

Elle a averti de la situation déplorable dans laquelle vivent quelque 125’000 réfugiés, dans la région de Diffa, au Niger, dispersés sur plus de 140 sites. Selon le PAM, plus de 52% des familles déplacées et d’accueil souffraient fin 2014 de malnutrition sévère (14%) ou modérée (38,7%). Un enfant déplacé sur trois souffre de malnutrition aiguë.

La population de Diffa a doublé depuis le début du conflit, provoquant “une énorme pression sur la vie des gens et les stocks alimentaires” de ses habitants, déjà confrontés à de multiples sécheresses depuis plusieurs années, a affirmé Mme Byrs. “Un arrêt des combats est crucial pour reprendre l’aide”, a-t-elle dit.

Au Niger, il y a en temps normal 3,4 millions de personnes qui souffrent d’insécurité alimentaire, dont 1,3 million d’enfants touchés par la malnutrition aiguë, selon le PAM.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision