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G20 Finances: les Etats-Unis empêchent un accord sur le protectionnisme

Le ministre américain des Finances Steven Mnuchin s'est fait remarquer samedi en Allemagne lors du sommet du G20 des Finances. Keystone/DPA dpa/A3796/_UWE ANSPACH sda-ats

(Keystone-ATS) Le gouvernement américain Trump, aux positions climato-sceptiques et hostiles au libre-échange, a réussi à peser sur la gouvernance mondiale. Washington a fait retirer samedi du communiqué final du G20 Finances les mentions du protectionnisme et de l’Accord de Paris.

“Un désaccord entre un pays et tous les autres”, a résumé le ministre français Michel Sapin lors d’une conférence de presse.

Sur le commerce mondial, “nous travaillons à renforcer la contribution du commerce à nos économies”, écrivent sobrement les ministres des pays les plus puissants du monde réunis vendredi et samedi à Baden-Baden (ouest de l’Allemagne) pour des négociations laborieuses sur ces deux points.

La traditionnelle condamnation du protectionnisme que le G20 reprenait comme en antienne a donc disparu du texte de cinq pages. Selon plusieurs sources, les Etats-Unis s’y opposaient, compte tenu des positions hostiles au libre-échange de Donald Trump.

USA: renégocier l’OMC?

Le nouveau secrétaire d’Etat américain au Trésor Steven Mnuchin a par ailleurs déclaré que les Etats-Unis n’excluaient pas de renégocier les accords multilatéraux de l’OMC. Il a aussi affirmé que les plaidoyers passés du G20 en faveur du libre-échange n’étaient “pas pertinents”.

Les accords de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC), dont le siège est à Genève, ont été signés en 1994 et sont entrés en vigueur en 1995. Ils servent de cadre multilatéral pour la libéralisation du commerce, en poussant à l’ouverture des frontières aux échanges commerciaux. L’organisation a toutefois connu plusieurs revers au cours de son existence et voit sa vocation mondiale contestée par de plus en plus de projets d’accords commerciaux régionaux.

La France regrette

De même, aucune mention de l’Accord de Paris de 2015 sur le changement climatique, quelques jours après la présentation par l’administration américaine d’un projet de budget qui sabre les fonds alloués à la lutte contre le réchauffement et alors que M. Trump a multiplié les sorties hostiles à la lutte contre le changement climatique.

“Je regrette (…) que nos discussions aujourd’hui n’aient pas pu aboutir de manière satisfaisante sur deux priorités absolument essentielles dans notre monde actuel et sur lesquelles la France souhaite que le G20 continue à agir fermement et de manière concertée”, a réagi Michel Sapin. Il a toutefois estimé que ces absences ne traduisaient pas un recul ou une inflexion de la gouvernance mondiale.

L’Allemagne minimise

L’Allemagne, qui préside le G20 cette année et qui a beaucoup oeuvré pour éviter un esclandre ou une fracture ouverte visible de tous, a aussi tenu à minimiser la portée de ces inflexions à la doctrine du G20. “Les Américains n’ont pas été isolés. C’est le rôle de la présidence (du G20) de réunir, pas d’isoler”, a déclaré, lors de la conférence de presse finale, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schauble.

D’un point de vue plus général, les ministres et participants ont relevé que la croissance de l’économie mondiale était en progrès. “La croissance se renforce à travers le monde”, a déclaré la directrice générale du FMI Christine Lagarde dans un communiqué.

Sur les autres sujets traditionnels du G20, lutte contre l’évasion fiscale, le blanchiment, ou encore réforme de l’architecture financière internationale, le communiqué est dans la continuité de ses précédents. De même pour les changes, un sujet pourtant potentiellement sensible compte tenu des récentes déclarations de l’administration américaine sur la devise chinoise ou européenne.

Nouveaux sujets

Parmi les sujets nouveaux, le G20 s’est également inquiété des conséquences potentielles de la cyber-criminalité sur les systèmes financiers internationaux, demandant au conseil de stabilité financière (FSB) de faire un état des lieux des normes et pratiques en la matière.

Les ministres ont aussi donné leur aval à un plan en faveur de l’Afrique destiné à favoriser l’investissement privé sur ce continent. Ils ont aussi entériné l’idée de la publication en juillet d’une liste de pays non coopératifs en matière de fiscalité, liste qui devra être assortie d’un éventail de sanctions.

Face à l’impasse des ministres des Finances sur le commerce et le climat, la responsabilité de trouver une solution, ou d’entériner une rupture, risque de revenir aux chefs d’Etat et de gouvernement. Ces derniers doivent se réunir en juillet à Hambourg.

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