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Identifier les appels anonymes à manifester serait disproportionné

(Keystone-ATS) L’identification des auteurs anonymes d’appels à manifester lancés sur les réseaux sociaux n’est pas la panacée, selon le Conseil fédéral. Cela risque fort d’empiéter sur les droits fondamentaux. Le gouvernement s’en remet aux cantons pour éventuellement légiférer.

Tout est parti d’une initiative cantonale bernoise déposée après le cortège “Tanz dich frei”, qui avait dégénéré dans les rues de la capitale au printemps 2013. Le texte demande à la Confédération de légiférer afin d’identifier les personnes qui lancent, par le biais d’Internet, des appels à manifester et à participer à des événements non autorisés.

Le Conseil des Etats n’a pas donné suite à cette initiative, mais il a exigé un rapport sur la question. Dans le document adopté vendredi, le gouvernement continue de douter de la proportionnalité et de la légalité d’une telle mesure.

Disproportionné

Une identification des organisateurs de manifestations permettrait certes aux autorités d’entrer en contact avec eux et de trouver un accord sur le déroulement de l’événement. Mais elle n’empêcherait pas les excès spontanés et incontrôlés de violence, surtout s’ils sont commis par des tiers.

La levée de l’anonymat pose aussi un problème de responsabilité civile. Selon le rapport, il serait inconciliable avec la liberté d’opinion et de réunion de tenir l’organisateur, sans faute de sa part, responsable de tous les dommages découlant de débordements en lien avec une manifestation. Cela n’entre en jeu que s’il appelle lui-même à la violence ou néglige certaines obligations de collaborer.

Autre problème: il pourrait ne pas être possible dans les faits d’identifier les auteurs d’appels. D’importants fournisseurs de services de communication dérivés ont leur siège et leur infrastructure à l’étranger. Ils ne peuvent dès lors pas tomber sous le coup du droit suisse, ou seulement au moyen de l’entraide judiciaire.

Aux cantons de régler la question

Pour le reste, le Conseil fédéral s’en remet aux cantons pour légiférer ou non sur la communication d’adresse Internet en dehors d’une procédure pénale. La Confédération est certes compétente en matière de télécommunication et de coordination des efforts en matière de sécurité intérieure.

On pourrait ainsi invoquer son rôle quand il s’agit de mise en oeuvre technique de l’identification. Certaines questions organisationnelles et administratives quant à la collecte de données pourraient être réglées au niveau fédéral.

Par contre, il appartient par principe aux cantons, dans leur législation sur la police, de régler les cas, les conditions et la procédure dans lesquelles l’identification des organisateurs de manifestations peut être ordonnée.

Au niveau formel, une telle réglementation devrait obligatoirement passer par une loi. Et s’il y a nécessité d’uniformiser le droit, le Conseil fédéral privilégie la voie d’une convention intercantonale.

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