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Il y a 40 ans, Berne autorisait les seins nus aux bains publics

Après les années 1980, l'engouement pour le topless est retombé. Depuis, peu de femmes enlèvent le haut aux bains publics (archives). Keystone/SAMUEL TRUEMPY sda-ats

(Keystone-ATS) Depuis 40 ans, les femmes sont autorisées à évoluer seins nus dans les bains publics de Berne. En 1978, la justice bernoise décidait de ne plus considérer cette nudité partielle comme une grave infraction à la moralité.

Dans une missive du 23 janvier 1978, la Chambre d’accusation de la Cour suprême bernoise invitait le commandement de police à renoncer à poursuivre d’office les femmes en costume de bain “sans haut”. Ceci “au vu de l’évolution des conceptions juridiques”.

Ce faisant, la Cour suprême se détournait d’une directive de 1964 qui recommandait de sanctionner le découvrement des seins, considéré comme un acte obscène. Tout au plus pouvait-il être reproché à ces femmes “une conduite inconvenante”.

Les juges de la Cour suprême ne voulaient toutefois pas que cette nouvelle conception du droit soit considérée comme prétexte à une éventuelle sanction pénale. Dans leur lettre à la police, ils évoquaient “le bon sens” qui doit prévaloir dans ces cas, “pour autant qu’il soit présent”.

Berne devance Zurich

De nombreuses femmes ont pris à coeur cette nouvelle liberté, bien que l’été 1978 se soit révélé plutôt maussade. Les bains du Marzili, en pleine ville de Berne, sont devenus la Mecque du “topless”. Des titres du journal populaire Blick – comme “Busen vor dem Bundeshaus” (seins nus devant le Palais fédéral) – ont attiré sur les lieux la gent masculine, munie de caméras.

Les maîtres-nageurs ont parfois eu à intervenir lorsque les femmes se sentaient trop importunées par les voyeurs. Des bobines de film ont même été détruites.

La Neue Zürcher Zeitung relatait la nouvelle mode du Marzili avec plus de sérénité, y voyant un signe d’ouverture de la société. Seule irritation sur les bords de la Limmat: le fait que les Bernois aient réagi plus vite que les Zurichois.

Charge symbolique

Après les années 1980, l’engouement pour le topless est retombé. Depuis, peu de femmes enlèvent le haut aux bains publics, hormis dans les zones réservées comme le “Paradiesli” du Marzili, où une nudité totale est de mise. De hauts murs protègent des regards indiscrets.

Le topless n’est jamais devenu cette évidence naturelle espérée par les mouvements féministes, expliquait l’historienne Caroline Arni en 2016 à la NZZ. La poitrine féminine est si chargée symboliquement “qu’on exprime toujours quelque chose, qu’on la couvre ou pas”.

Initiative UDF

Le peuple bernois a même failli se prononcer, il y a 40 ans, sur les seins nus. Le politicien Werner Scherrer, de l’Union démocratique fédérale (UDF) s’était en effet mobilisé contre la dégradation des us et coutumes lors des baignades.

En janvier 1979, l’UDF déposait une initiative munie de 15’000 signatures. Le texte demandait de sanctionner les femmes dénudant leur poitrine en public.

En mars de l’année suivante, par 89 voix contre 55, le Grand Conseil bernois déclarait l’initiative non valable à cause d’un vice de forme: les initiants avaient manqué de formuler la sanction requise.

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