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Il y a 70 ans, l’odyssée de “l’Exodus” pour aider à créer Israël

(Keystone-ATS) Il y a 70 ans, le navire “Exodus” quittait le sud de la France pour la Palestine avec 4500 personnes à bord. L’épisode, qui allait favoriser la création d’un Etat juif en Palestine, est commémoré dimanche en présence de quelques-uns des survivants de la traversée.

“C’est la dernière fois qu’on a des survivants, dans 10 ans ils auront disparu”, souligne Freddy Dran, co-président du “comité Exodus” et représentant de la communauté juive de Sète, le port du sud de la France d’où le navire avait levé l’ancre.

Deux d’entre eux sont attendus mais Noah Klieger, journaliste franco-israélien et ancien membre de l’équipage, qui a abondamment témoigné par le passé, sera en revanche pour la première fois absent des commémorations.

“On s’aperçoit qu’à Sète et dans la région, la moitié de la population ne connaît pas cet épisode qui a marqué l’histoire du 20e siècle”, déplore M. Dran, qui conçoit ce 70e anniversaire comme un “projet pédagogique à destination des jeunes générations”.

Transfert discret

Dans la nuit du 10 au 11 juillet 1947, un étrange navire surchargé, avec plus de 4500 personnes à son bord, pour la plupart des rescapés des camps nazis, quittait laborieusement le port de Sète.

Le rafiot à fond plat, prévu pour transporter quelques centaines de personnes sur des fleuves des Etats-Unis et totalement inadapté à la navigation en mer, avait été récupéré à la ferraille par des militants de la Hagana, l’organisation militaire sioniste clandestine, puis transféré discrètement en Méditerranée.

Parallèlement, des milliers de candidats à l’émigration clandestine vers la Palestine sont acheminés dans le plus grand secret vers Sète à bord de 172 camions.

“Cet évènement était totalement clandestin, c’était la Hagana qui était à la manoeuvre, très peu de gens parmi la population sétoise étaient informés”, souligne Gustave Brugidou, président de la Société d’Etudes historiques et scientifiques de Sète et sa région.

Plus intéressés en ce 10 juillet d’après-guerre par le passage du Tour de France, les Sétois “étaient étonnés de voir arriver sur le Môle Saint Louis ces gens en habits d’hiver alors qu’on était en plein été”, dit-il.

Briser le blocus britannique

Les passagers de plusieurs nationalités – dont plus de 1700 femmes et 950 enfants – s’entassent alors à bord de ce qui est encore le “President Warfield”. Le commandant Yossi Harel, après avoir attendu en vain un remorqueur, décide de partir quand même et quitte difficilement le port dans la nuit, après s’être ensablé.

Destination officielle: la Colombie. Mais, en réalité, le navire se dirige péniblement vers la Palestine, sous mandat britannique. L’objectif est de briser le blocus britannique sur l’immigration juive sur ce territoire arabe où les sionistes veulent obtenir la création d’un Etat juif.

Le 16 juillet, le bateau est rebaptisé “Exodus 47” en référence à l’exode biblique de Moïse, et arbore le drapeau marqué de l’étoile de David.

Emotion mondiale

Deux jours après, au large de la ville d’Haïfa, en Palestine, il est arraisonné par les Britanniques, au prix d’au moins deux morts. Les passagers sont rudement transférés dans des bateaux-prisons à Port-de-Bouc, dans le sud de la France, où ils refusent de débarquer, puis à Hambourg, en Allemagne, dans la zone d’occupation contrôlée par les Britanniques, où ces rescapés de l’Holocauste sont une nouvelle fois parqués dans des camps. L’émotion est intense dans le monde entier.

“Grâce ou à cause de l’épopée de ce navire parti du port de Sète, l’Etat d’Israël a été créé quelques mois plus tard” en Palestine, souligne M. Brugidou. Il insiste notamment sur l’influence que cet épisode aura sur le vote de l’ONU en faveur du partage de la Palestine, en novembre 1947, qui aboutira en 1948 à la création d’Israël.

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