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Jour d’élections générales sans incident majeur au Mozambique

Fidèle à la tradition, le chef de l'Etat sortant Filipe Nyusi a voté à la première heure mardi. KEYSTONE/AP/FERHAY MOMADE sda-ats

(Keystone-ATS) Les Mozambicains ont voté mardi dans le calme pour des élections générales. Celles-ci pourraient contraindre le parti au pouvoir depuis 1975, affaibli par une crise économique et les conflits armés, à céder une partie de son contrôle sur le pays.

Les quelque 20’000 bureaux de vote du pays ont refermé les urnes autour de 18h00 au terme d’une journée sans incident grave, selon les ONG locales. La campagne s’était déroulée sous très haute tension.

Le chef de l’Etat sortant Filipe Nyusi et son Front de libération du Mozambique (Frelimo) devraient une nouvelle fois l’emporter sur leur éternel rival Ossufo Momade et sa Résistance nationale du Mozambique (Renamo). Le seul changement est attendu dans les scrutins régionaux où, pour la première fois, les gouverneurs des dix provinces du pays, jusque-là nommés par le régime, sont élus au suffrage universel.

Selon les analystes, la Renamo pourrait ainsi prendre le contrôle de trois à cinq provinces.

“Respecter la volonté du peuple”

Fidèle à la tradition, M. Nyusi a voté à la première heure mardi dans une école du centre de la capitale Maputo. “Le Mozambique a choisi d’aller de l’avant de façon pacifique. Continuons ce processus de façon sereine”, a-t-il exhorté devant la presse, “que le meilleur gagne”.

“J’appelle la population mozambicaine à venir voter massivement”, a de son côté lancé M. Momade après avoir glissé son bulletin dans une urne de Ilha de Moçambique (centre). “J’en appelle à mon frère Nyusi, le chef de l’armée, à respecter la volonté du peuple”.

Le gouvernement et l’ex-rébellion de la guerre civile (1975-1992), devenue principal parti d’opposition, ont signé en août un accord de paix et de désarmement censé mettre un terme définitif aux affrontements sporadiques qui avaient repris entre eux en 2013. La Suisse a soutenu ce processus de paix.

Mais les six semaines de campagne ont réveillé les tensions entre les deux camps. De nombreux incidents violents ont été recensés dans tout le pays. Ils ont culminé avec l’assassinat, il y a une semaine, d’une figure de la société civile de la province de Gaza (sud) chargée de l’observation des élections, abattue au volant de sa voiture par des policiers.

“Le Frelimo a peur”

“Le Frelimo a peur de se retrouver dans l’opposition”, a expliqué Luter Simango, député du Mouvement démocratique du Mozambique (MDM, opposition), “alors il utilise tous les moyens de l’Etat pour survivre (…), y compris la police et les services secrets”.

Le président sortant Filipe Nyusi et son gouvernement ont abordé ce scrutin dans une position de faiblesse inédite dans un pays dirigé par le Frelimo depuis l’indépendance du pays en 1975. Lors des élections locales l’an dernier, le parti au pouvoir a réalisé la plus mauvaise performance électorale de son histoire avec “seulement” 51,8% des suffrages au niveau national.

Depuis 2016, son gouvernement est fragilisé par une grave crise financière causée par le scandale de sa “dette cachée”, un emprunt secret de 2 milliards de dollars qui a mis au jour une vaste opération de corruption au sommet de l’Etat.

Il est en outre confronté depuis deux ans à une mystérieuse insurrection islamiste qui a fait des centaines de morts dans la province du Cabo Delgado (nord) et risque d’y retarder l’exploitation très attendue de prometteuses réserves sous-marines de gaz.

Electeurs “fantômes”

Dans ce climat tendu, la société civile a dénoncé ces dernières semaines une série d’irrégularités, dont la présence massive d’électeurs “fantômes”, laissant présager de fraudes comme lors des élections locales d’il y a un an.

“Nous avons noté quelques problèmes aujourd’hui dans les provinces de Tete, Nampula et Zambezia, où des électeurs ont été pris avant de voter avec plusieurs bulletins marqués en faveur du Frelimo”, a déclaré à l’AFP Dercio Alfazema, du collectif Sala da Paz. Le directeur des services techniques de l’administration en charge des élections, Felisberto Naife, a confirmé ces incidents, sans autre commentaire.

Selon les premières estimations du collectif Sala da Paz, la participation au scrutin devrait être légèrement supérieure à celle enregistrée en 2014 (49%). Les premiers résultats significatif sont attendues dès jeudi.

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