Des perspectives suisses en 10 langues

L’argent volé par des dictateurs pourra être bloqué efficacement

(Keystone-ATS) L’argent des potentats doit être bloqué efficacement. Le Conseil national s’est rallié lundi à la copie plus sévère des sénateurs. Seule l’UDC s’est opposée à ce tour de vis, en vain.

Le Conseil national a ainsi éliminé les dernières divergences et mis la nouvelle loi sous toit. Grâce à ce texte, le Conseil fédéral n’aura plus besoin de recourir au droit d’urgence, utilisé encore l’an dernier pour geler les avoirs du président ukrainien déchu Viktor Ianoukovitch.

Le Conseil fédéral pourra ordonner le blocage des fonds d’origine criminelle en vue de l’entraide judiciaire lors du renversement du potentat. Il faudra toutefois que l’Etat en question connaisse une corruption manifeste et que les intérêts suisses soient en jeu.

La condamnation préalable du dictateur ne sera pas nécessaire. Le gel de fonds sera même possible pour des potentats en place si le changement du gouvernement est inexorable. Si l’Etat d’origine est défaillant, le gouvernement pourra geler l’argent en vue d’une procédure de confiscation.

Il sera en outre possible d’entamer une procédure administrative devant les tribunaux suisses pour confisquer des valeurs déjà bloquées. Le but est d’éviter de devoir rendre de l’argent à un potentat à cause de l’échec d’une demande d’entraide judiciaire.

Tour de vis accepté

La Chambre des cantons a refusé lors de la dernière session d’émousser ce texte. Elle avait biffé les deux assouplissements votés par le National contre l’avis du Conseil fédéral. Le National a finalement rejoint la position du Conseil des Etats.

Le cercle des personnes qui risqueront le blocage de leurs fonds ne sera pas restreint aux seuls proches impliqués, comme le voulait l’UDC. Sa proposition a été rejetée par 117 voix contre 61. Le Conseil fédéral ne liste que les personnes qui pourraient avoir joué un rôle dans l’évasion d’argent de potentats, a remarqué le conseiller fédéral Didier Burkhalter.

Sans limite temporelle

Le délai de prescription prévu par le droit pénal ne pourra plus être invoqué pour empêcher la restitution de fonds. Par 120 voix contre 62, le Conseil national est aussi revenu sur sa position à ce sujet, au dam de l’UDC.

Le but de la loi est de parvenir à l’entraide, mais quand l’Etat est défaillant comme en Haïti avec Jean-Claude Duvalier, les efforts n’aboutissent pas toujours et le blocage administratif des fonds est le seul moyen de préserver les intérêts publics, a rappelé Karl Vogler (PDC/OW).

Avec cette nouvelle loi, il en va aussi de la place financière et économique suisse. “Elles sont fortes et doivent le rester afin de protéger les emplois qui en découlent”, a souligné le ministre des affaires étrangères.

Informations bancaires

La Suisse devrait par ailleurs pouvoir transmettre à l’Etat concerné des informations, notamment bancaires, pour l’aider à déposer des demandes d’entraides correctes et suffisamment étayées.

La restitution de l’argent se fera via des programmes d’intérêt public pour améliorer les conditions de vie de la population du pays d’origine. Le Conseil fédéral pourra prélever jusqu’à 2,5% des fonds confisqués pour dédommager la Confédération et les cantons de leurs frais.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision