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L’EI a profité de transferts d’armes irresponsables, selon Amnesty

(Keystone-ATS) Les transferts irresponsables d’armes effectués vers l’Irak sont à l’origine du redoutable arsenal utilisé par le groupe Etat islamique (EI), souligne Amnesty International dans un rapport publié mardi. L’organisation appelle à des contrôles plus stricts.

“L’armement immense et varié qu’utilise le groupe armé illustre combien le commerce irresponsable des armes alimente les atrocités à grande échelle”, affirme Patrick Wilcken, chercheur pour Amnesty. “Une mauvaise réglementation couplée à une absence de surveillance des énormes flux d’armes en Irak depuis plusieurs décennies ont été une aubaine pour l’EI et d’autres groupes armés”, a-t-il estimé.

Les armes fabriquées à l’étranger que l’EI a saisies en s’emparant de la ville de Mossoul en juin 2014 ont été utilisées pour conquérir d’autres territoires et commettre des crimes contre les civils, souligne le rapport.

L’organisation djihadiste s’est également emparée d’importantes quantités d’armes en prenant le contrôle en Irak de bases de l’armée et de la police à Fallouja, Saqlawiya et Ramadi (ouest), Tikrit (nord) ainsi qu’en Syrie.

Les opérations lancées par les forces gouvernementales pour reprendre Ramadi, chef-lieu de la province d’Al-Anbar, sont ainsi entravées par les “plus de 100 véhicules de combat blindés, y compris des chars” dont l’EI s’est emparé, rapporte Amnesty.

Depuis les années 1980

L’EI distribue les armes saisies sur différents fronts: des armes saisies à Mossoul ont ainsi été utilisées deux semaines plus tard à 500 km de là, dans le nord de la Syrie. Le mouvement utilise des armes et munitions provenant d’au moins 25 pays, dont une bonne partie de Russie, comme le fusil d’assaut kalachnikov.

Dans les petites armes, les djihadistes combattent avec des fusils Tabuk de fabrication irakienne, Bushmaster E2S de fabrication américaine, CQ chinois, G36 allemand ou FAL belge.

Les stocks d’armes de l’armée irakienne ont gonflé durant la guerre Iran-Irak (1980-1988), que le rapport décrit comme “un moment majeur pour le développement du marché global d’armes modernes”. L’Irak a également été inondé d’armes après l’invasion de 2003 conduite par les Etats-Unis, et le flux des armes s’est poursuivi à la faveur d’accords conclus après le retrait américain en 2011.

Pour un embargo total

Amnesty souligne que les pays exportateurs – y compris les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU – étaient bien conscients des risques du transfert d’armes en Irak, où la corruption est endémique et les mécanismes de contrôle très faibles.

“Les conséquences en Irak et dans la région environnante de la prolifération des armes et des abus ont déjà détruit les vies et la subsistance de millions de personnes et posent une menace permanente”, affirme M. Wilcken.

Amnesty appelle à un embargo total sur les livraisons d’armes aux forces gouvernementales syriennes, et à une règle sur la “présomption de refus” d’exportation d’armes vers l’Irak qui conditionnerait les transferts à des évaluations strictes.

L’ONG appelle aussi à la ratification du Traité sur les Transferts d’Armes (TTA) par les pays qui ne l’ont pas encore fait, tels que les Etats-Unis, la Russie et la Chine.

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