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L’islamologue suisse Tariq Ramadan arrêté à Paris

L'islamologue suisse Tariq Ramadan, lors d'un discours prononcé devant un rassemblement d'organisations musulmanes en février 2016 à Lille. KEYSTONE/AP/MICHEL SPINGLER sda-ats

(Keystone-ATS) Tariq Ramadan a été placé mercredi en garde à vue à Paris pour s’expliquer sur les accusations de viols portées contre lui par deux femmes. L’islamologue suisse controversé, qui fait aussi l’objet de soupçons en Suisse, a catégoriquement démenti ces accusations.

Le théologien est entendu par les enquêteurs de la police judiciaire parisienne “dans le cadre de l’enquête préliminaire ouverte à Paris des chefs de viols et violences volontaires”, selon une source judiciaire. Deux femmes ont accusé M. Ramadan de les avoir violées en 2009 et en 2012 en France.

La première plaignante, Henda Ayari, accuse l’islamologue de l’avoir violée dans un hôtel parisien en 2012. Elle avait elle-même révélé l’affaire sur sa page Facebook, après avoir évoqué les faits présumés dans un livre en 2016, sans en identifier l’auteur.

En réponse, la défense du théologien a versé au dossier des pièces censées, selon elle, discréditer la parole de cette ancienne salafiste devenue militante féministe, âgée de 41 ans.

Parmi ces documents figurent notamment des conversations sur Facebook au cours desquelles une femme qui se présente comme Henda Ayari fait en 2014 – soit deux ans après les faits présumés – , des avances explicites au théologien qui n’y donne pas suite.

Les avocats de Henda Ayari avaient affirmé que leur cliente était restée en contact avec le théologien de 55 ans, mais uniquement jusqu’à la mi-2013. “Ce n’était pas une relation mais une emprise sectaire”, avaient-ils affirmé pour justifier le maintien des contacts entre eux deux.

Les plaignantes déjà entendues

Une seconde plainte visant Tariq Ramadan, pour des faits similaires dans un hôtel à Lyon en 2009, a été déposée fin octobre quelques jours après la première plainte. Dans ce volet, l’identité de la plaignante n’a pas été publiquement révélée. Elle avait fourni des certificats médicaux à l’appui de son témoignage.

Les deux femmes ont déjà été entendues par la police, à Rouen et à Paris. L’essayiste Caroline Fourest, qui a indiqué avoir remis des documents aux enquêteurs, a également été auditionnée.

Les avocats de M. Ramadan avaient riposté début novembre en déposant une plainte pour subornation de témoin visant nommément Caroline Fourest qui combat médiatiquement l’islamologue depuis plusieurs années.

Ils réclament par ailleurs que l’enquête identifie le magistrat que Mme Fourest dit avoir fait rencontrer à une des plaignantes et qui aurait manqué de signaler les faits à la justice.

“Une campagne de calomnie”

Cette affaire a suscité de vifs débats entre défenseurs et détracteurs de M. Ramadan et de Mme Ayari. Cette dernière a porté plainte contre X à la mi-novembre après avoir fait l’objet d’injures et de menaces.

Petit-fils du fondateur de la confrérie égyptienne islamiste des Frères musulmans, Tariq Ramadan a pris un congé depuis début novembre de l’université britannique d’Oxford, où il est professeur d’études islamiques.

Il n’a pris publiquement la parole qu’à deux reprises depuis le début de cette affaire: sur Facebook, fin octobre, pour dénoncer une “campagne de calomnie” enclenchée par ses “ennemis de toujours”. Sur Twitter, il avait aussi rejeté des accusations concernant des actes qui remontent aux années 90, lorsqu’il enseignait dans un collège à Genève.

Soupçons à Genève

Quatre anciennes élèves accusent en effet Tariq Ramadan d’avoir abusé d’elles. Selon leurs témoignages publiés dans la Tribune de Genève, l’islamologue aurait tenté de séduire une de ces élèves âgées de 14 ans et l’aurait harcelée. Il serait arrivé à ses fins avec trois autres âgées de 15 à 18 ans en ayant des relations sexuelles avec elles.

Les faits décrits par ces ex-élèves sont prescrits. Aucune plainte n’a été déposée. Tariq Ramadan a pour sa part annoncé une plainte pour diffamation.

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