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L’UE mise sur la Turquie pour endiguer l’afflux de migrants

(Keystone-ATS) L’Union européenne (UE) cherche à mieux se coordonner avec ses voisins pour répondre à la crise migratoire. En premier lieu avec la Turquie, dont le président est venu lundi à Bruxelles pour de difficiles négociations.

Pour l’UE, où quelque 630’000 migrants sont entrés illégalement depuis janvier, l’objectif est de faire d’Ankara un partenaire pour maîtriser un flux de demandeurs d’asile sans précédent depuis 1945. Dirigeants européens et turcs travaillent sur un “plan d’action” commun.

L’Europe “doit mieux gérer ses frontières”, a concédé en début de soirée le président du Conseil européen, Donald Tusk, après un entretien avec le président turc Recep Tayyip Erdogan. Mais nous “attendons que la Turquie en fasse de même”, a insisté M. Tusk.

L’UE a réitéré sa proposition d’une aide financière et a mis sur la table la libéralisation des visas pour les ressortissants turcs voyageant en Europe. Il faut un “contrat de confiance mutuelle”, a estimé la Commission européenne.

Trois conditions

“Si on veut régler le problème des réfugiés, il y a trois choses” à faire, a estimé M. Erdogan. “La première est d’abord d’entraîner et équiper” les forces rebelles modérées opposées au régime de Bachar al-Assad, “la deuxième est de décréter une zone de sécurité qui devrait être protégée du terrorisme, et la troisième concerne une zone d’exclusion aérienne”, a-t-il ajouté.

La “zone de sécurité” est souhaitée par Ankara le long de sa frontière avec la Syrie. Les Européens se sont jusque-là montrés peu enthousiastes à cette idée.

Une “zone de sécurité” nécessite “une décision du Conseil de sécurité de l’ONU”, a prévenu le président du Parlement européen, Martin Schulz. Par ailleurs, Moscou s’est prononcé contre la création d’une zone d’exclusion aérienne en Syrie telle que réclamée par la Turquie.

Plan d’action

Il y a peu de chance pour qu’un accord sur un plan d’action soit conclu lundi soir à Bruxelles. Des membres de la Commission se rendront “cette semaine” en Turquie afin de poursuivre ces discussions.

La Turquie a accueilli officiellement 2,2 millions de Syriens depuis le printemps 2011 et le début de la guerre civile meurtrière qui déchire son voisin.

Frappes russes en Syrie

M. Erdogan est aussi venu chercher à Bruxelles l’appui de ses alliés de l’OTAN et des hauts responsables européens dans le bras de fer entre les aviations turque et russe à la frontière syrienne. Car Moscou a lancé depuis mercredi passé des frappes en soutien au président syrien Bachar al-Assad.

Plusieurs incidents ont opposé des avions de chasse turcs et russes. La Russie et la Turquie ont des visions opposées sur l’avenir d’Assad, l’ennemi juré d’Ankara qui réclame depuis des années son départ.

L’OTAN a jugé lundi “extrêmement dangereuses” les incursions de l’aviation russe en Turquie. Ses 28 membres se sont inquiétés des frappes aériennes de la Russie en Syrie “qui ont fait des victimes civiles et ne visaient pas” les djihadistes de l’Etat islamique.

Ebauche de coopérations

Si la Turquie est un partenaire essentiel pour régler la crise migratoire, l’UE veut plus largement mettre sur pied une coordination avec tous les pays se trouvant sur la “Route des Balkans”. Celle qu’ont empruntée cette année plus de 400’000 demandeurs d’asile en Europe, depuis la Syrie jusqu’aux frontières extérieures de l’Europe, selon l’ONU.

Une réunion doit avoir lieu jeudi à Luxembourg entre les ministres de l’Intérieur et des Affaires étrangères de l’UE, de la Turquie, du Liban et de la Jordanie. Ceux de l’Albanie, de la Bosnie-Herzégovine, de la Macédoine, du Monéténégro, de la Serbie et du Kosovo y prendront part également.

Tandis que s’ébauchent ces coopérations, le flux de migrants se poursuit vers l’Europe, avec son cortège de drames. Par exemple, 85 corps de migrants ont été découverts ces cinq derniers jours sur des plages du littoral de la Libye.

Pression migratoire

L’Allemagne, une des destinations principales des demandeurs d’asile, pourrait devoir accueillir jusqu’à 1,5 million de personnes en 2015, affirme lundi le quotidien allemand Bild. Mais le gouvernement allemand n’a pas confirmé ces chiffres.

Pour gérer la pression migratoire, Frontex a exhorté les pays membres de l’UE à mettre à sa disposition 775 garde-frontières supplémentaires. Ils doivent renforcer en priorité les équipes en Grèce et en Sicile chargées d’enregistrer les nouveaux arrivants.

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