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La “marraine du Panier” jugée pour fraude à la TVA sur le CO2

Une douzaine de réseaux similaires ont été mis au jour en France, souvent imbriqués, et, parmi d'autres points communs, le recours à Israël comme base arrière ou refuge. KEYSTONE/EPA/JUSTIN LANE sda-ats

(Keystone-ATS) Le procès de la plus grosse fraude à la TVA sur le carbone à ce jour en France, 385 millions d’euros détournés au détriment de l’Etat français entre avril 2008 et mars 2009, a commencé lundi. En vedette, une femme, fait rare dans ce type de dossier.

Surnommée la “marraine du Panier”, un quartier populaire de Marseille, Christiane Melgrani, 59 ans, marseillaise d’origine corse, a déjà été condamnée à plusieurs reprises, notamment pour trafic de stupéfiants. Elle est accusée d’avoir été une des actrices principales de cette fraude réalisée par le biais de sociétés à la tête desquelles elle avait placé des proches.

Selon l’accusation, elle a elle-même estimé ses gains à environ 10 millions d’euros, mais son train de vie montre qu’ils ont sans doute été bien supérieurs.

Gérants de paille

Sont jugés avec elle 35 autres prévenus, dont sa compagne Angelina Porcaro, notamment accusée d’avoir activement participé au recrutement des gérants de paille utilisés pour l’escroquerie et le blanchiment du produit de la fraude.

Selon l’accusation, les liens supposés d’Angelina Porcaro avec la mafia napolitaine et ceux de Christiane Melgrani avec le “milieu” corse ont été mis à contribution pour tenter de faire pression sur les autres protagonistes de ce dossier.

Parmi les prévenus se trouvent également une figure du “milieu” marseillais de 75 ans, 12 fois condamné, des “retraités”, un avocat, un expert comptable, une sculptrice et des promoteurs immobiliers.

Homme d’affaire israélien

Un homme d’affaires sulfureux d’origine israélienne, résidant à Monaco avant son arrestation, seul autre prévenu détenu à ce stade, est soupçonné d’avoir été avec Christiane Melgrani un des principaux auteurs de la fraude, notamment en apportant les fonds initiaux.

Selon l’accusation, il en a en tout cas été un des grands bénéficiaires. Les enquêteurs ont retrouvé sur une kyrielle de comptes lui appartenant plus de 80 millions d’euros.

Un de ses associés, résident en Israël et objet d’un mandat d’arrêt comme sept autres prévenus en fuite, a aussi participé dès l’origine à l’escroquerie.

Faille de la législation

La fraude consistait à profiter d’une faille de la législation européenne sur les “droits à polluer” alloués aux entreprises et à acheter ces quotas hors taxe à des opérateurs étrangers pour les revendre à des sociétés françaises soumises à la TVA, en “oubliant” au passage de reverser celle-ci à l’Etat.

Le produit de la fraude était soit réinvesti en nouveaux achats de quotas ou en produits immobiliers, soit blanchi par l’intermédiaire d’un réseau de sociétés.

Une douzaine de réseaux similaires ont été mis au jour en France, souvent imbriqués, avec des liens entre certains de leurs membres et, parmi d’autres points communs, le recours à Israël comme base arrière ou refuge.

5 à 6 milliards de perte pour l’UE

Au total, la Cour des comptes a évalué à 1,6 milliard d’euros la perte subie par l’Etat français du fait de leur activité entre l’automne 2008 et juin 2009. Pour l’ensemble de l’UE, la perte serait de cinq à six milliards d’euros.

Des noms du “dossier marseillais” apparaissent dans d’autres affaires déjà jugées, dont les dossiers “Crépuscule” () ou “Mimran-Mouly” (), comme celui d’un homme, Grégory Zaoui, condamné en septembre dernier dans le premier de ces dossiers et en fuite.

Déjà associé dans le passé à Christiane Melgrani et considéré comme un des “inventeurs” de la fraude à la taxe carbone, il aurait contribué à la former.

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