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La ‘Ndrangheta s’est implantée en Suisse, selon une chercheuse

Une séquence vidéo de l'"Operazione Helvetica" publiée par la police italienne en août 2014. Une quinzaine de membres présumés de la 'Ndrangheta avaient été arrêtés dans les cantons de Thurgovie, Zurich et du Valais. KEYSTONE/CARABINIERI DI REGGIO CALABRIA sda-ats

(Keystone-ATS) La Suisse n’est pas épargnée par la mafia italienne. Sa branche calabraise – la ‘Ndrangheta – s’y est même implantée, affirme la journaliste indépendante Madeleine Rossi, qui a consacré un rapport de près de cent pages au phénomène.

“Si on ne la voit pas, la ‘Ndrangheta est pourtant bien présente en Suisse”, explique la chercheuse et journaliste dans une interview parue samedi dans Le Temps. Les arrestations de plusieurs membres de la cellule de Frauenfeld ces dernières années en sont la preuve. Et il ne s’agit que d’une cellule parmi d’autres en Suisse, notamment au Tessin.

La présence de la mafia est due à deux raisons principales: se faire oublier et blanchir de l’argent. Certaines personnes en cavale arrivent même à obtenir un permis B, comme ce fut le cas des deux mafieux arrêtés en Haut-Valais en 2016. “Ces personnes restent très discrètes, elles vivent comme tout le monde”, affirme Madeleine Rossi.

Les membres ne sont pas chez eux et ils savent qu’ils risquent plus gros qu’en Italie. Par ailleurs, s’ils attirent l’attention, ils sont punis par la maison mère, explique la journaliste.

Blanchiment

Quant au fonds de commerce de la ‘Ndrangheta, le blanchiment d’argent, il est certes de plus en plus dur, mais toujours possible en Suisse. Si les grandes banques sont toujours plus pointilleuses à ce sujet, d’autres sont moins regardantes. De plus, la restauration et l’hôtellerie permettent également de blanchir de l’argent.

“Au Tessin, plusieurs bars sont vides toute la journée mais dégagent un chiffre d’affaires important”. Si ce n’est pas une preuve, c’est un indice important, selon la journaliste.

Politiciens au courant

Les politiciens en Suisse sont très au fait du sujet, ce qui n’est pas le cas de la majorité de la population, poursuit-elle. “Mais quelques freins importants semblent les empêcher de passer à l’action”.

L’enjeu financier est très gros et certaines professions largement représentées au Parlement fédéral en profitent, affirme cette spécialiste de la mafia. “Certaines fiduciaires et quelques conseillers financiers gagnent des sommes importantes grâce à la présence de la mafia”. Le lobby des armes a également beaucoup à y perdre, selon elle.

En français bientôt

L’extension de la ‘Ndrangheta va crescendo et ce sera également le cas en Suisse, constate Madeleine Rossi. Mais il ne faut pas tomber dans la paranoïa, ni stigmatiser toute la communauté calabraise ou italienne.

Le rapport “Mafias italiennes en Suisse, panorama, perception et cadre législatif” de Madeleine Rossi a été publié en mai en italien. Elle traduit actuellement ce texte en français, précise Le Temps.

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