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La commission nationale d’éthique appelle à la prudence

En Suisse, il n'existe aucune statistique sur les femmes potentiellement concernées par une transplantation d'utérus (photo symbolique). KEYSTONE/FR170882 AP/MOLLY RILEY sda-ats

(Keystone-ATS) La transplantation d’utérus a conduit à une première naissance en Suède en 2014 et est en Suisse au stade de projet. La Commission nationale d’éthique dans le domaine de la médecine humaine (CNE) émet des réserves quant à cette nouvelle procédure médicale.

“En Suisse, le public a été informé par la presse de l’existence de la transplantation d’utérus, notamment en lien avec un projet de l’hôpital universitaire de Zurich”, peut-on lire jeudi dans une prise de position de la CNE. Quand bien même on se situe à un stade précoce, cette dernière émet des réserves.

“Nous avons été approchés, et nous nous sommes par conséquent prononcés indépendamment de toute procédure obligatoire”, explique jeudi Valérie Junod, membre de la CNE.

Professeur en droit à l’Université de Genève, elle rappelle que la procédure de transplantation d’utérus est pour l’heure expérimentale: “Avant que la Suisse ne passe à la phase clinique, il faudrait que les projets de recherche soient planifiés et menés avec grand soin”.

En Suisse, il n’existe aucune statistique sur les femmes concernées, souffrant d’une stérilité absolue et désirant avoir un enfant biologique.

Faible bénéfice

“Il faut faire preuve d’une grande prudence”, ajoute Valérie Junod. “Les conséquences physiques et psychiques de la procédure sur les personnes directement concernées ne doivent pas être sous-estimées”, note la CNE. “On ignore en particulier s’il existe des risques à moyen et long terme pour la santé de l’enfant”, précise-t-elle.

A ce jour, une quarantaine de transplantations d’utérus ont été réalisées dans différents pays, et onze enfants en sont issus: “Le suivi de chacun d’entre eux n’a pas forcément donné lieu à des études publiées”, selon Valérie Junod. La CNE précise que neuf de ces enfants, âgés entre 0 et 3 ans, sont prématurés et de petite taille.

A cela s’ajoutent des réserves éthiques: “Le bénéfice potentiel pour la société de recherches impliquant cette procédure est relativement faible comparé à d’autres domaines de la recherche médicale”. De plus, ajoute la CNE, “la procédure ne sera vraisemblablement abordable que pour les couples aisés”.

Le coût de la greffe – estimé à plusieurs dizaines de milliers de francs – n’est pas couvert par l’assurance de base. “Lorsque les projets de recherche concernant la procédure de transplantation d’utérus sont (co-)financés avec de l’argent public, on peut se demander s’il s’agit là d’une utilisation appropriée des ressources limitées dont dispose le système de santé”, conclut la CNE.

Pas encore de transplantation

L’hôpital universitaire de Zurich n’effectuera pas de transplantation de l’utérus cette année. “Nous allons attentivement évaluer la prise de position de la CNE et l’inclurons dans le programme de recherche sur ces transplantations”, réagit-il à la demande de Keystone-ATS. Il ajoute que toutes les exigences éthiques et administratives seront respectées.

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