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La libre-circulation dans l’UE à l’épreuve du terrorisme

La conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a participé à la réunion des ministres de l'Intérieur de l'UE à Luxembourg. KEYSTONE/EPA/JULIEN WARNAND sda-ats

(Keystone-ATS) Les dérogations à la libre-circulation dans l’espace Schengen ont fait débat vendredi à Luxembourg. Plusieurs pays pratiquant des contrôles depuis 2015 (France, Allemagne, Autriche, Danemark, Suède) ont déjà annoncé leur prolongation.

“Nous partageons les inquiétudes de certains Etats membres quant à la question de la sécurité”, a déclaré devant la presse le commissaire européen Dimitris Avramopoulos, en charge des affaires intérieures. “Mais Schengen est vivant, et doit rester vivant”, a-t-il ajouté.

“Si Schengen meurt, l’Europe mourra”, a-t-il mis en garde, faisant écho aux Etats membres s’inquiétant de voir les contrôles aux frontières, normalement exceptionnels et temporaires, se prolonger sans cesse.

Liberté face au terrorisme

La Commission européenne a plusieurs fois répété ces derniers mois qu’elle n’accepterait plus à partir de novembre de donner son feu vert à la prolongation des contrôles actuels. Ceux-ci sont basés – sauf pour la France – sur des raisons migratoires et sur le chaos observé fin 2015 à la frontière extérieure grecque.

Mais ces pays invoquent désormais comme Paris la menace terroriste, qui leur offre plus de liberté sur le plan juridique pour réintroduire des contrôles, sans attendre d’autorisation de Bruxelles.

Assouplir Schengen

Ils ont par ailleurs demandé que les règles du Code Schengen soient à l’avenir assouplies et clarifiées, afin notamment d’en réintroduire certaines pour des durées plus longues qu’actuellement.

La Commission européenne a accepté le principe: elle a mis sur la table fin septembre une réforme qui porterait à un an, au lieu de six mois actuellement, les périodes maximales de rétablissement des contrôles, dans le cas de menaces sur la sécurité d’un pays.

Si la menace persiste, elle propose même de pouvoir les prolonger pendant deux ans de plus. Dans ce cas, toutefois, l’accord des autres Etats membres serait nécessaire.

La Suisse favorable

La discussion sur le contrôle aux frontières a été “plutôt controversée”, a affirmé la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, interrogée par l’ats. Selon elle, les Etats qui partagent de larges pans de frontière avec d’autres Etats Schengen se sont montrés plus favorables que les autres aux contrôles temporaires.

La ministre en charge du Département fédéral de justice et police (DFJP) a affirmé accueillir “positivement sur le fond” la proposition de la Commission européenne. Au cours des dernières années, la situation a changé, a-t-elle noté. “On doit en assumer les conséquences”.

Pour la ministre de la Justice, il faut cependant tomber d’accord sur des règles “auxquelles tous devront ensuite se conformer”.

Souveraineté nationale

Or, la France et l’Allemagne, qui ont annoncé qu’elles prolongeraient de six mois leurs contrôles sur la base des règles actuelles, souhaitent des périodes plus longues que celles proposées par la Commission. Surtout, elles contestent le besoin d’obtenir l’aval des autres pays européens.

“Nous souhaitons conserver la souveraineté nationale sur un problème fondamental pour chaque pays, celui du terrorisme”, a déclaré le ministre français de l’Intérieur, Gérard Collomb, qui s’est exprimé devant la presse au côté de son homologue allemand Thomas de Maizière.

“Très triste”

Plusieurs pays ont au contraire déploré les prolongations des contrôles actuels, ainsi que la perspective de les rendre encore plus aisés à réintroduire. Ils craignent que la libre-circulation soit à terme menacée au sein de l’espace Schengen, avec des conséquences économiques.

“Je suis très triste de ces propositions”, a réagi vendredi le ministre slovaque de l’Intérieur Robert Kalinak. Selon un diplomate, la Pologne, la Hongrie et la Slovénie ont également exprimé leur mécontentement lors de la discussion entre ministres.

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