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La mafia calabraise est la seule présente dans le monde entier

La lutte contre la mafia requiert l'utilisation des services de renseignement pour mener à bien les opérations, mais ces derniers sont surtout orientés vers la lutte contre le terrorisme (image d'illustration). KEYSTONE/EPA ANSA/ELISABETTA BARACCHI sda-ats

(Keystone-ATS) La ‘Ndrangheta, la mafia calabraise, est la seule organisation criminelle présente “sur tous les continents”. Et elle continue de s’élargir, a affirmé mardi Nicola Gratteri, un magistrat italien qui lutte contre la mafia depuis des décennies.

“La ‘Ndrangheta est présente partout où il y a de l’argent et du pouvoir à gérer. Elle n’est ni de gauche ni de droite”, a déclaré M. Gratteri devant la presse étrangère à Rome. Elle est présente “en Europe occidentale, en Amérique du Nord, centrale, Amérique du Sud, en Afrique et elle s’étend désormais en Europe de l’Est” et en Asie, a-t-il ajouté.

Ce magistrat de 60 ans, qui vit sous escorte policière depuis 1989, est actuellement procureur général de Catanzaro, chef-lieu de la Calabre. Il présentait son livre, “L’histoire secrète de la ‘Ndrangheta”, écrit en collaboration avec le professeur Antonio Nicaso, spécialiste des études sur les mafias, qui enseigne aux Etats-Unis et au Canada.

Lacunes européennes

Europhile convaincu et “favorable à une Europe fédérale”, M. Gratteri reproche néanmoins à la construction européenne “une absence de culture de la sécurité”.

“Tant que l’Europe ne sera pas convaincue de la présence de la ‘Ndrangheta de manière structurelle dans ses pays”, les progrès dans la lutte contre cette mafia seront difficiles car celle-ci adopte désormais un profil bas, cherchant à ne pas attirer l’attention de l’Etat sur elle.

“La ‘Ndrangheta fait deux choses en Europe. Elle vend de la cocaïne et avec l’argent de ce trafic elle achète tout ce qui est à vendre”, a poursuivi le magistrat.

“Mais attention, aujourd’hui ce sont des cafés, des pizzerias ou des hôtels, mais demain ça pourrait être des actions dans des télévisions ou des journaux, de manière à orienter l’opinion publique”, a mis en garde M. Gratteri.

“Paradis juridiques”

M. Nicaso a pour sa part souligné l’évolution récente de la mafia. “Il fut un temps où elle cherchait les paradis fiscaux, aujourd’hui elle cherche les paradis juridiques”, ces pays qui ne disposent pas d’une législation spécifique destinée à la lutte contre la mafia, comme c’est le cas en Italie.

La lutte contre la mafia est d’autant plus difficile qu’elle requiert l’utilisation des services de renseignement pour mener à bien les opérations, alors que ces derniers sont orientés vers la lutte contre le terrorisme.

“L’activité terroriste est une source de forte préoccupation dans la société mais pas l’activité mafieuse. Donc on s’occupe du terrorisme mais il faudrait combattre les deux simultanément”, a conclu M. Nicaso.

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