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La Suisse doit tourner la page du nucléaire

(Keystone-ATS) La Suisse doit tourner la page du nucléaire au profit du courant vert. Ce changement s’accompagnera d’une baisse de la consommation d’énergie. Les Etats sont entrés lundi dans le vif de la “Stratégie énergétique 2050”, repoussant les objections de la droite dure.

La Suisse a décidé en 2011 de sortir du nucléaire. Pour y parvenir, la “Stratégie énergétique 2050” pose les jalons d’un retrait par étape en réduisant la consommation d’électricité, accroissant la part de courant vert et diminuant les émissions de CO2.

Le projet représente une chance pour l’innovation et permettra de gagner en bien-être, a estimé Konrad Graber (PDC/LU). En décembre, le Conseil national avait entériné le paquet par 110 voix contre 84.

L’atome n’est plus rentable

La stratégie interdit la construction de nouvelles centrales nucléaires et prescrit des conditions de sécurité pour le maintien des réacteurs actuels, vieux de plus de 40 ans. Le changement énergétique a déjà commencé, a commenté Verena Diener (PVL/ZH).

La baisse des prix de l’électricité a rendu l’exploitation de centrales nucléaires toujours moins rentables, a constaté Didier Berberat (PS/NE). Il s’agit dès lors de remplacer les 40% d’énergie atomique actuelle, a résumé Ivo Bischofberger (PDC/AI), au nom de la commission.

Développer l’énergie verte

La Suisse importe 60% de son énergie, a remarqué la conseillère fédérale Doris Leuthard. “Si on ne fait rien, ce sera fatal pour un pays qui dépend autant de l’étranger”. Pour remplacer de manière sûre l’énergie actuellement produite par le nucléaire et réduire la dépendance vis-à-vis de l’étranger, les énergies renouvelables devront être davantage développées.

Le Conseil des Etats s’est montré plus timoré que le National quant aux objectifs nécessaires pour y parvenir. Par 27 voix contre 16, il a décidé de réduire à 11’400 gigawatts/heure (GWh) la production d’énergie verte d’ici 2035. “Ce chemin est moins ambitieux que celui du Conseil fédéral, mais plus réalisable”, a argumenté Ivo Bischofberger (PDC/AI), au nom de la commission.

La gauche aurait voulu s’en tenir aux 14’500 GWh de la Chambre du peuple. “Sans quoi nous serons trop dépendants de l’étranger”, a défendu en vain Robert Cramer (Verts/GE). La droite dure aurait elle voulu renoncer à fixer toute valeur indicative dans la loi.

Réduire la consommation

A leur niveau, les consommateurs devront faire attention à la quantité d’énergie qu’ils utilisent. D’ici 2020, la consommation d’énergie devra être réduite de 16% par rapport au niveau de l’an 2000. D’ici 2035, la baisse devra atteindre 43%.

Par 23 voix contre 17, le Conseil des Etats a refusé de revoir ces objectifs à la baisse comme le demandait la droite. Ce scénario prend en compte le développement de l’innovation technologique et se base sur des estimations scientifiques, a précisé la ministre de l’Energie.

Les craintes de l’économie

La majorité des sénateurs a jugé la stratégie raisonnable et applicable. Elle est restée insensible aux contestations de quelques représentants de la droite dure, qui auraient voulu enterrer le projet, ou au moins l’assouplir au profit des entreprises. “Le projet est dommageable à l’économie”, s’est inquiété Peter Föhn (UDC/SZ).

Avec le franc fort, les entreprises souffrent déjà, a fait valoir Hannes Germann (UDC/SH). Mais les bas prix de l’électricité contrebalancent ces coûts, a contrecarré Raphaël Comte. Et le libéral-radical neuchâtelois d’ajouter qu’il existe également des allègements.

Les sénateurs ont toutefois fait un geste envers l’économie. Les autorités devront tenir compte des mesures volontaires prises par les entreprises avant de fixer les objectifs.

Liberté pour les cantons

Par ailleurs, des centrales thermiques à gaz, voire à charbon pourront être construites sans vérifier que le courant pourrait être produit par des installations renouvelables. La Chambre des cantons s’est ralliée par 21 voix contre 19 au National. Cette libéralisation demeure toutefois théorique faute de projets de ce type.

Finalement, les cantons ne seront pas obligés de consulter la Confédération pour définir les parties de leur territoire destinées à la construction de centrales pour le courant vert. Le Conseil des Etats a rejoint le National sur ce point.

Pas assez vite pour les Verts

Cette stratégie, qui tient lieu de contre-projet à l’initiative populaire des Verts “Sortir du nucléaire”, amène de nouvelles idées mais reste trop timide, a pour sa part attaqué Robert Cramer (Verts/GE). Les mesures prévues ne permettent pas de remplacer suffisamment rapidement les centrales nucléaires.

Le texte des écologistes réclame en effet la mise hors-service de Beznau I un an après le feu vert du peuple, alors que les quatre autres centrales devraient être fermées dès qu’elles atteindront l’âge de 45 ans.

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