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La Suisse va extrader un cadre du PKK vers l’Allemagne

Accusé d'avoir envoyé des jeunes combattre au Proche-Orient, un cadre du PKK sera extradé vers l'Allemagne (archives). KEYSTONE/AP/FELIPE DANA sda-ats

(Keystone-ATS) La Suisse accorde l’extradition d’un cadre du PKK réclamé par l’Allemagne: le Tribunal fédéral a admis un recours de l’Office fédéral de la justice (OFJ) qui considère que les faits reprochés outre-Rhin sont aussi punissables en Suisse.

Inscrit dans le Système d’information Schengen (SIS) à la demande de l’Allemagne, l’homme a été arrêté le 1er novembre 2019 à l’aéroport de Zurich. Berlin a adressé une demande d’extradition à la Suisse en invoquant les activités de l’intéressé au sein du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

En sa qualité de responsable du Ciwanên Azad (jeunesse libre), puis de dirigeant du PKK pour la région Saarbruck/Sarreland, le militant est soupçonné par le Parquet de Stuttgart d’avoir recruté des jeunes Kurdes. Ces derniers auraient rejoint les Forces de défense du peuple (HPG), une branche armée du PKK.

Opposition de Bellinzone

L’OFJ a considéré que ces faits relevaient du soutien à une organisation criminelle et qu’ils étaient donc réprimés en Suisse également. En conséquence, il a admis la demande allemande.

Saisi par le Kurde, le Tribunal pénal fédéral en a jugé tout autrement. Selon les juges de Bellinzone, la période de recrutement correspondait à une trêve entre la Turquie et le PKK. Les jeunes combattants étaient donc engagés dans une guerre civile en Syrie et en Irak afin de défendre les populations contre l’État islamique.

Dans son recours, l’OFJ a invoqué des prises de position commandées au Service de renseignement de la Confédération (SRC), à l’ambassade de Suisse à Ankara et au Ministère de la justice du Bade-Wurtemberg. A tout titre tout à fait exceptionnel, le Tribunal fédéral a admis ces nouveaux éléments dès lors que Bellinzone avait tranché en complétant de son propre chef le dossier.

Distinctions byzantines

Pour la 1ère Cour de droit public, il convient de décider si le PKK, respectivement les HPG qui lui sont affiliées, est une organisation criminelle au sens du droit suisse. Dans son arrêt publié mercredi, elle rejette en substance les distinctions établies par le Tribunal pénal fédéral portant sur le PKK et les organisations armées ainsi que sur les zones d’engagement des combattants.

Le Tribunal fédéral souligne d’une part que les HPG et autres organisations sont subordonnées au PKK et qu’elles en constituent le “bras armé”. D’autre part, les rapports produits par l’OFJ montrent que ces mouvements n’ont pas cessé leurs actions en Turquie durant la période où des pourparlers de paix étaient en cours. Et rien n’exclut que les combattants recrutés pour un conflit aient été engagés par la suite sur d’autres fronts.

Dans ces conditions, les distinctions opérées par l’instance inférieure apparaissent artificielles, conclut le Tribunal fédéral. Qui partage donc la position de l’OFJ selon laquelle les activités du militant en faveur des HPG relèvent à première vue du soutien à une organisation criminelle. Et que la demande d’extradition doit être admise. (arrêts 1C_228 et 261/2020 du 12 juin 2020)

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