Le chef de la Congrégation pour la doctrine de la foi écarté
(Keystone-ATS) Le pape François a remplacé samedi le cardinal Gerhard Ludwig Müller, chef de la Congrégation pour la doctrine de la foi et puissante personnalité du Vatican, par un archevêque espagnol, jésuite comme lui. Des frictions étaient apparues sur les divorcés remariés.
Le cardinal conservateur allemand de 69 ans arrivait au terme de son mandat de cinq ans à la tête de cette institution responsable de la doctrine de l’Eglise. Nommé en 2012 par Benoît XVI, il est le premier préfet de cette Congrégation à quitter cette charge avant l’âge de la retraite canonique théorique de 75 ans, a relevé samedi l’agence spécialisée sur le Vatican I.Media.
Le “gardien du dogme” avait clairement affiché des désaccords avec le pape, notamment sur la volonté de François de faire adopter une ligne plus souple envers les divorcés remariés. Parallèlement, la Congrégation pour la doctrine de la foi a été accusée plus tôt cette année de résister à la lutte contre les prêtres pédophiles.
Le cardinal Müller est remplacé par l’actuel secrétaire de cette Congrégation, Luis Francisco Ladaria Ferrer, 73 ans. Le prélat espagnol avait été nommé à ce poste en juillet 2008 par Benoît XVI. En août 2016, le pape François l’a désigné président de la Commission d’Etude sur le diaconat des femmes.
“Désaveux” du pape
En remerciant ainsi le cardinal Müller, Jorge Bergoglio semble ne pas avoir apprécié son “exposition médiatique” et ses “interventions qui presque à chaque fois sonnaient comme des désaveux à l’égard du pape”, a jugé samedi le vaticaniste Andrea Tornielli sur le site Vatican Insider.
Le cardinal allemand a notamment pris à plusieurs reprises ses distances avec l’exhortation apostolique “Amoris Laetitia”, publiée en 2016 par le pape, qui a ouvert, dans certains cas, la possibilité de la communion pour les divorcés remariés. Ce texte, bien qu’édicté par le pape, ne change en rien la doctrine de l’Eglise, qui empêche ces personnes d’avoir accès aux sacrements, avait-il ainsi souligné.
Les plus traditionalistes au sein de l’Eglise catholique considèrent le mariage chrétien comme irréversible. Un remariage suivant un divorce ne peut donc être qu’un adultère, qui interdit toute possibilité d’avoir accès aux sacrements de l’Eglise, dont la communion.
Quatre cardinaux conservateurs ont ainsi adressé une lettre au pape dans laquelle ils expriment leurs “doutes” après la publication de cette exhortation apostolique. Le cardinal Müller n’en est pas signataire, mais il avait pleinement reconnu la légitimité de la démarche de ses pairs.
En février, il avait rappelé que le mariage était un “sacrement, et qu’aucun pouvoir sur terre comme au ciel, pas même un ange ou encore le pape lui-même, n’avaient le pouvoir de changer cela”.
Lutte insuffisante contre la pédophilie
Des appels à sa démission avaient également été lancés par des cercles catholiques réformistes, jugeant que la Congrégation pour la doctrine de la foi traînait les pieds pour mettre en place un tribunal destiné à juger les évêques coupables de protéger des prêtres pédophiles.
L’Irlandaise Marie Collins, qui a claqué la porte de la Commission pour la protection des mineurs créée par le pape François, avait alors clairement mis en cause la Congrégation dirigée par le cardinal Müller, institution également responsable des affaires d’abus sexuels commis par des membres du clergé.
Le cardinal Müller avait alors rétorqué que ce tribunal n’était qu’un “projet” qui risquait surtout de faire doublon avec d’autres initiatives déjà en place pour juger ces évêques.
“En l’espace de trois jours, deux cardinaux importants au Vatican ont quitté leur poste”, a relevé de son côté le vaticaniste Christopher Lamb, après le “congé” pris par le cardinal australien George Pell, inculpé jeudi pour abus sexuels dans son pays.
