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Le Conseil fédéral contre l’initiative sur le secret bancaire

(Keystone-ATS) Le Parlement est prié de rejeter l’initiative de la droite exigeant le maintien du secret bancaire pour les clients suisses. La sphère privée est déjà suffisamment protégée et le texte risque de faciliter l’évasion fiscale, estime le Conseil fédéral.

Opposé à l’initiative populaire “Oui à la protection de la sphère privée”, le gouvernement a transmis mercredi son message aux Chambres fédérales. Il recommande également de ne pas opposer de contre-projet.

L’initiative, déposée en 2014 par des politiciens de droite, réclame le droit à la protection de sa sphère privée, notamment financière. Le but est d’éviter que les cantons puissent exiger des banques qu’elles fournissent des informations concernant un contribuable en cas de soustraction fiscale et non plus seulement de fraude.

Trouver des informations

Pour le Conseil fédéral, la sphère privée des contribuables qui sont en règle avec le fisc est suffisamment protégée par le secret fiscal. Par contre, si le citoyen refuse de coopérer, le fisc doit pouvoir continuer de se procurer des renseignements auprès de tiers.

Le texte de la droite compromettrait la perception correcte des impôts, critique le gouvernement. Les informations concernant des contribuables ne pourraient plus être données que dans le cadre d’une procédure pénale et sur la base d’un soupçon d’infraction fiscale grave validé par un tribunal.

Le montant de l’impôt devrait être “important” et avoir été détourné de manière continue. Le fisc ne pourrait donc plus, à de rares exceptions, se procurer ces renseignements auprès de l’employeur ou d’une compagnie d’assurance.

Statut quo pour les données bancaires

L’acceptation de l’initiative ne changerait rien en matière d’accès aux données bancaires. Les autorités cantonales n’ont déjà pas le droit de se procurer des informations auprès des banques.

Mais là aussi, l’initiative limiterait les moyens d’investigation. Les banques doivent en effet fournir actuellement des renseignements dans le cadre des procédures pénales concernant les impôts indirects, ainsi que lors d’enquêtes fiscales spéciales de l’Administration fédérale des contributions portant sur des infractions fiscales graves.

Pas contre le secret bancaire

“Le rejet du texte ne signifie pas que le gouvernement veut remettre en question le secret bancaire”, a précisé à la presse la ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf. Il n’y a aucun rapport entre les deux sujets, a-t-elle ajouté.

La droite avait réagi violemment en 2013 au projet du Conseil fédéral de faciliter l’accès des fiscs cantonaux aux données bancaires de personnes soupçonnées de dissimuler leurs revenus. Gelée, la réforme du droit pénal fiscal est en train d’être retravaillée. Mais l’aval d’une autorité judiciaire et plus seulement du chef des autorités fiscales cantonales devrait être requis pour la transmission d’informations, a redit la grande argentière.

Blanchiment et terrorisme

L’initiative populaire ne vise que le secret bancaire pour les clients privés en Suisse. Mais elle pourrait porter préjudice à l’entraide avec l’étranger dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Les initiants assurent que ce n’est pas leur volonté. Tout dépendra toutefois des dispositions de mise en oeuvre, a relevé la grande argentière.

Les intermédiaires financiers pourraient ne plus avoir le droit de fournir au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent des renseignements sur des infractions fiscales qualifiées commises par des personnes ayant leur domicile ou leur siège en Suisse.

Cette interdiction pourrait s’étendre aux renseignements concernant des infractions non fiscales, mais se rapportant aux impôts. Ce qui remettrait en question les récentes décisions du Parlement de se conformer aux recommandations du Groupe d’action financière (GAFI). La Suisse risquerait les foudres de ses partenaires.

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