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Le dissident chinois Liu Xiaobo est mort d’un cancer

Le dissident chinois Liu Xiaobo est mort à l'âge de 61 ans, ont annoncé les autorités de la province du Liaoning. Le prix Nobel de la paix 2010 y était hospitalisé pour un cancer du foie en phase terminale (archives). KEYSTONE/AP Video sda-ats

(Keystone-ATS) Le dissident Liu Xiaobo, premier Chinois à avoir obtenu en 2010 le prix Nobel de la paix, est décédé jeudi d’un cancer du foie. Le régime communiste ne l’aura finalement pas laissé terminer ses jours en liberté à l’étranger, comme le souhaitait notamment Berlin.

Son décès a été annoncé par le bureau des affaires juridiques de Shenyang, là où Liu Xiaobo a passé ses derniers jours. Plusieurs de ses organes étaient atteints et il a été impossible de le sauver, ont précisé les services juridiques de cette ville du nord-est de la Chine, dans un bref communiqué diffusé jeudi sur Internet.

Agé de 61 ans, ce symbole de la lutte pour la démocratie avait été admis à l’Hôpital universitaire numéro 1 de Shenyang après plus de 8 ans passés en détention.

Il est le premier prix Nobel de la paix à mourir privé de liberté depuis le pacifiste allemand Carl von Ossietzky, décédé en 1938 dans un hôpital alors qu’il était détenu par les nazis.

L’annonce de son décès tombe mal pour Pékin, mettant en lumière le traitement des opposants politiques chinois à l’approche cet automne du XIXe congrès du Parti communiste chinois, qui devrait accorder un nouveau mandat au président Xi Jinping à la tête du pays.

Bloqué à domicile

Ancienne figure de proue du mouvement démocratique de Tiananmen en 1989, bête noire du régime chinois, l’écrivain et professeur de littérature Liu Xiaobo avait bénéficié d’une mise en liberté conditionnelle après le diagnostic en mai d’un cancer du foie en phase terminale.

La nouvelle de son hospitalisation n’avait été annoncée que fin juin. Plusieurs organisations de défense des droits humains et des proches de M. Liu avaient alors reproché à Pékin d’avoir attendu que son état de santé empire avant de lui permettre de sortir de prison.

En réponse, les autorités avaient affirmé que le dissident était soigné par des cancérologues réputés. Liu Xiaobo avait lui-même fait savoir qu’il souhaitait suivre un traitement à l’étranger, un appel relayé par la communauté internationale mais rejeté par Pékin qui y voyait une ingérence dans ses affaires intérieures.

“Un héros” pour Berlin

L’hôpital de Shenyang avait assuré début juillet qu’un tel déplacement aurait été “dangereux” vu son état. Mais deux médecins occidentaux, un Allemand et un Américain appelés à son chevet, avaient contredit les autorités médicales chinoises, jugeant possible de transférer le malade au plus vite à l’étranger.

“Sa résistance par la non-violence a fait de lui un héros de la lutte pour la démocratie et les droits de l’Homme”, a tweeté peu après l’annonce de sa mort le ministre allemand de la justice Heiko Maas. Le gouvernement allemand avait appelé mercredi Pékin à laisser sortir Liu Xiaobo de son pays et se disait “prêt à l’accueillir”.

Réaction plus outrée à Oslo: “Le gouvernement chinois porte une lourde responsabilité pour sa mort prématurée”, a communiqué le comité Nobel norvégien.

Chaise vide

Liu Xiaobo avait été arrêté en décembre 2008 puis condamné un an plus tard pour subversion à 11 ans de prison. Le régime communiste lui reprochait d’avoir corédigé un manifeste, la Charte 08, prônant notamment des élections libres.

L’opposant avait appris depuis sa cellule qu’il avait obtenu le prix Nobel de la paix. Le comité Nobel entendait récompenser à travers lui “un long combat non violent pour les droits humains fondamentaux en Chine”. Lors de la cérémonie de remise du prix à Oslo, il avait été représenté par une chaise vide.

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