Des perspectives suisses en 10 langues

Le National devrait rejeter l’initiative pour une monnaie pleine

Les partisans de l'initiative dite de la monnaie pleine peinent à convaincre: les parlementaires ne croient pas en leurs recettes pour assurer la stabilité financière (archives). KEYSTONE/ANTHONY ANEX sda-ats

(Keystone-ATS) Les banques privées ne devraient pas être empêchées de créer de l’argent en octroyant des prêts. Le National s’achemine vers un rejet de l’initiative “Monnaie pleine”. Seule une poignée d’élus y voit le moyen d’éviter bulles financières et faillites bancaires.

La décision devrait tomber le jeudi 14 décembre. La crainte d’une nouvelle crise financière est en toile de fond de la discussion. Mais pourquoi réformer un système qui fonctionne, s’est interrogé Guillaume Barazzone (PDC/GE) au nom de la commission. La Suisse ne doit pas faire cavalier seul et sauter dans l’inconnu.

La réforme proposée par l’initiative populaire “Pour une monnaie à l’abri des crises: émission monétaire uniquement par la Banque nationale!” serait brutale et hasardeuse. Il n’y a pour l’heure pas d’études scientifiques sérieuses sur l’impact d’un tel changement, a poursuivi le Genevois.

Beaucoup craignent pour l’indépendance de la BNS, qui devrait, avec l’initiative, transférer la masse monétaire aux collectivités publiques ou aux citoyens. Seules quelques voix se sont élevées pour soutenir le texte lancé par l’association Modernisation Monétaire (MoMo).

Critique du système

Cette initiative porte en elle une dénonciation de ce qu’est devenu notre monde financier, a plaidé Ada Marra (PS/VD). Il y a un hiatus entre économie réelle et financiarisation à tout-va. Les riches sont toujours plus riches, et le profit est mal distribué.

L’initiative aurait l’avantage d’instaurer un système financier au service de l’homme, selon la socialiste. Partageant cette critique du système, les camarades de la Vaudoise émettent toutefois des doutes quant aux recettes proposées. On ne peut pas faire une confiance absolue en la seule BNS, selon Daniel Brélaz (Verts/VD).

Comme au Conseil des Etats, qui s’est déjà clairement prononcé contre la “Monnaie pleine”, la gauche plaide pour une alternative: imposer aux banques trop grandes pour faire faillite un ratio de fonds propres non pondéré de 10%.

Ce contre-projet direct, qui serait soumis parallèlement au peuple, ne devrait toutefois pas être retenu. Selon la droite, la législation actuelle concernant la problématique des banques d’importance systémique permet déjà d’agir.

Créer de l’argent

Actuellement, la création d’argent repose sur l’émission de pièces et de billets par la Banque nationale, l’achat de devises ou de papiers valeurs par cette dernière ainsi que l’octroi par la BNS de crédits aux établissements bancaires et les prêts de ces derniers.

Les banques commerciales ne peuvent que créer de la monnaie scripturale. Cet argent comptable ne représente pas un moyen de paiement légal. Un compte bancaire ne constitue qu’une créance des clients, soit la promesse des établissements de leur payer le solde en billets et pièces.

Changer la donne

Les partisans de l’initiative critiquent ce système qui s’accompagne de formation de dettes. Les banques créent plus d’argent que nécessaire.

Avec l’initiative, la BNS serait compétente pour produire l’ensemble de la masse monétaire. Cet argent nouvellement produit devrait l’être sans dette. La banque centrale devrait donc le transférer directement aux collectivités publiques ou aux citoyens.

La politique monétaire ne serait plus mise en oeuvre par le biais de taux d’intérêt mais par la gestion de la masse monétaire. Selon les initiants, l’argent de tous les comptes courants serait entièrement sécurisé. L’Etat n’aurait plus à sauver des banques à coups de milliards versés par les contribuables pour assurer le service des paiements.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision