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Le parquet requiert l’extradition du Kosovar Haradinaj

Le parquet de Colmar a préconisé l'extradition du kosovar Ramush Haradinaj (archives). KEYSTONE/AP/JEAN-FRANCOIS BADIAS sda-ats

(Keystone-ATS) Le parquet a préconisé jeudi l’extradition vers la Serbie de l’ancien rebelle kosovar Ramush Haradinaj, bloqué en France depuis début janvier. Belgrade l’accuse de crimes de guerre commis en juin 1999.

La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Colmar (est), en charge d’examiner cette demande d’extradition, rendra sa décision le 27 avril à 09h00. Si elle suit les préconisations du parquet de la ville, la décision finale reviendra au gouvernement français. Dans le cas contraire, M. Haradinaj, actuellement placé sous contrôle judiciaire, sera libre de regagner son pays.

L’avocate de l’ancien rebelle kosovar, Me Rachel Lindon, a longuement plaidé jeudi à l’audience que la Serbie n’avait “aucune compétence” pour juger son client, pour des crimes de guerre présumés commis entre le 12 et le 20 juin 1999 au Kosovo. A cette date, le territoire balkanique venait précisément d’être placé sous l’administration des Nations-unies, en vertu d’une résolution du Conseil de sécurité.

“Pas aussi simple”

“Ce n’est pas aussi simple”, a en substance souligné de son côté l’avocat général Patrick Steinmetz. Il s’est appuyé sur plusieurs décisions de la Cour de justice internationale de La Haye pour souligner qu’on ne pouvait affirmer avec certitude quel Etat exerçait sa souveraineté sur le Kosovo, dans cette période précise de juin 1999.

M. Haradinaj, 48 ans, a été interpellé le 4 janvier par la police française à son arrivée sur le territoire français, via l’aéroport franco-suisse de Bâle-Mulhouse.

Dans un récent entretien avec l’AFP, accordé à Strasbourg où il réside depuis son interpellation, il s’est dit victime de “persécution politique”. Il est soupçonné par la Serbie d’avoir participé en juin 1999 à des exactions contre des civils serbes au Kosovo.

Acquitté en 2008 et 2012

Il a été acquitté en 2008 et 2012 par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) qui le jugeait pour des crimes de guerre remontant à 1998. Les faits dont il est accusé dans cette procédure examinée en France remontent en revanche à 1999 et sont donc distincts, selon Belgrade.

Député et opposant au président Hashim Thaçi, Ramush Haradinaj bénéficie d’une grande popularité auprès de nombreux Kosovars. Ceux-ci le considèrent comme un héros de la guerre d’indépendance de 1998-1999 contre les forces de Belgrade.

L’arrestation de cet ancien haut responsable de l’Armée de libération du Kosovo (UCK) avait suscité un vif émoi au Kosovo, mais aussi en Albanie.

Ultime conflit ayant déchiré l’ex-Yougoslavie, la guerre au Kosovo a fait 13’000 morts. Elle a conduit à la sécession de cette région majoritairement peuplée d’Albanais, mais que la Serbie considère comme son berceau historique. Le Kosovo a déclaré en 2008 son indépendance, que Belgrade ne reconnaît pas.

Ancien réfugié politique en Suisse

Au début des années 1990, l’ancien chef rebelle s’est réfugié en Suisse. Il a alors gagné sa vie comme ouvrier du bâtiment, videur dans des boîtes de nuit ou maître de sport à Leysin (VD).

Il a quitté la Suisse en 1997 et regagné le Kosovo, où il a organisé un groupe conçu pour attaquer la police serbe déployée dans la province.

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