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Le thé de qualité fleurit en Suisse

Le thé est la deuxième boisson la plus bue au monde, après l'eau (archives). KEYSTONE/AP/ALASTAIR GRANT sda-ats

(Keystone-ATS) Il y a 13 ans, Tekoe a parié sur l’essor du thé premium en Suisse. Le breuvage séduit aujourd’hui un nombre croissant d’amateurs.

“On assiste à un boom du thé en feuilles”, constate Pierre Maget, cofondateur de Tekoe. Cette entreprise, basée à Lausanne, possède des boutiques de thé haut de gamme parsemées dans les grandes gares suisses romandes, mais aussi en Suisse alémanique et à l’étranger.

Cette évolution, commencée il y a environ cinq ans mais en forte progression d’année en année, est appelée “blooming market”. C’est un marché tout nouveau qui fleurit, explique Pierre Maget.

La deuxième boisson la plus bue au monde, après l’eau, séduit un nombre croissant d’amateurs. Aussi en Suisse, qui en a importé 5832 tonnes l’année passée, contre 4623 en 2012, selon les chiffres du Centre du Commerce International (ITC).

MenuCH, enquête nationale sur l’alimentation publiée par l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV), confirme la tendance. Les Suisses boivent en moyenne 2,9 décilitres de thé par jour et par personne, c’est-à-dire une tasse standard.

Boisson santé

Les raisons du succès du thé haut de gamme sont à rechercher dans le goût, mais surtout dans le côté bien-être. Prise de conscience et tendance sociétale, les consommateurs recherchent de plus en plus des produits sains et non sucrés.

Non plus associé à la maladie comme autrefois, le breuvage se démocratise donc sous sa forme “noble”. En témoigne la multiplication des magasins de thé en vrac dans les villes. Mais surtout l’exemple de Tekoe, actuellement leader en Suisse du thé en feuilles, qui a su surfer sur le phénomène de santé et bien-être.

“On conquiert une part de marché de gens qui boivent du thé en feuilles mais pas de thé en sachet”, explique Pierre Maget, qui ne désire pas communiquer de chiffres, mais qui parle d’une forte croissance pour son entreprise.

Selon lui, en général les ventes de thé de qualité progressent énormément, tandis que le marché du thé dust (poussière) stagne. Le thé en sachet industrialisé – dont Lipton, Twinings, ou encore Migros avec sa propre marque sont leaders sur le marché suisse – est considéré de moins bonne qualité, “car la poussière contenue dans les sachets n’amène pas de bienfaits”, précise-t-il.

Et, toute nouvelle tendance parue ces six derniers mois, selon Pierre Maget, les thés froids nature et peu sucrés connaissent actuellement une forte demande.

Un marché juteux

Les cofondateurs de Tekoe Pierre Maget et Valérie Peyre peuvent se définir comme des précurseurs de ce marché en Suisse. En 2004, ils ont amené du thé de qualité à l’emporter dans un lieu de passage, avec l’ouverture du premier petit magasin à la gare de Lausanne. Ce dernier sert aujourd’hui entre 1200 et 1500 personnes par jour dont l’âge moyen est de 25 ans.

La marque s’est emparée du marché il y a dix ans exactement, après trois ans d’activité, et compte aujourd’hui sept magasins en Suisse, un autre à Paris, à la gare de Lyon, ainsi qu’un magasin franchisé à Madrid. Elle vise maintenant à ouvrir de nouvelles boutiques ainsi qu’à développer son réseau de distribution.

“Nous voulons rentrer dans les grands magasins avec des corners”, précise Pierre Maget. Si les deux entrepreneurs ont été les premiers à se rendre compte du potentiel du produit, ils sont maintenant rejoints par bien d’autres acteurs.

Ces derniers désirent également mettre le thé de qualité à la portée de tous, à l’instar de Kusmi Tea. La marque française en pleine expansion a ouvert l’année passée un magasin à Lausanne qui propose du thé en feuilles vendu dans des boîtes colorées.

Mais pas seulement. Nestlé a lancé une nouvelle machine à thé avec le même principe de capsules que pour le café. Ces dernières contiennent du thé en feuilles. “Seulement en ville de Lausanne, cinq magasins ont ouvert depuis que nous sommes là”, résume Pierre Maget.

Tea rooms dans l’ombre

À l’ombre des grands acteurs et des PME comme Tekoe, on trouve les petits salons de thé traditionnels. Présents dans la région depuis plus longtemps, ils restent toutefois en dehors de ce marché rentable.

“Nous n’avons observé aucune hausse de la demande ces derniers temps, commente Ursula Selig, gérante de la Boîte à Thé à Rolle (VD). Celle-ci a ouvert son tea room il y a une trentaine d’années, “l’un des premiers sur la Côte” souligne-t-elle.

Ces boutiques, devenues quatre entre-temps, et présentes à Nyon (VD), Morges (VD), Rolle (VD) ainsi qu’Apples (VD), peuvent compter sur une clientèle d’habitués, pour la plupart des locaux. Pour Ursula Selig, Tekoe ne représente pas une concurrence pour les salons de thé classiques, “au contraire, c’est une bonne chose car ça démocratise une boisson bonne et saine, commente-t-elle, et ça permet de boire autre chose que les sachets Lipton.”

Par contre, cette passionnée de thé n’adhère pas “à la philosophie marketing” de Tekoe. “Je ne voudrais pas être à leur place, constate celle qui a ouvert son activité plus par amour du produit que pour des raisons économiques, nous ne sommes pas riches, mais on tourne”, conclut-elle.

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