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Les critères de l’UE sur les perturbateurs endocriniens déçoivent

L'annonce de la Commission doit permettre d'encadrer l'utilisation des perturbateurs endocriniens dans des pesticides et dans des biocides - c'est-à-dire herbicides, fongicides, produits de protection pour le bois ou le cuir et désinfectants pour les mains (image symbolique). KEYSTONE/GAETAN BALLY sda-ats

(Keystone-ATS) La Commission européenne a dévoilé mercredi ses critères de définition des “perturbateurs endocriniens”, substances chimiques nocives présentes dans des produits de la vie courante. Cette publication tardive est loin de satisfaire les défenseurs de l’environnement.

Selon les critères définis par Bruxelles, un perturbateur endocrinien est une substance qui a des effets indésirables sur la santé humaine, qui agit sur le système hormonal, et dont le lien entre les deux est prouvé. Ces critères se fondent sur ceux de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Attendue depuis plus de deux ans, l’annonce de la Commission devait permettre d’encadrer l’utilisation de ces substances dans des pesticides et dans des biocides – c’est-à-dire herbicides, fongicides, mais aussi par exemple produits de protection pour le bois ou le cuir et les désinfectants pour les mains. Elle déçoit les ONG.

Humains cobayes

La référence au seul effet sur les êtres humains a déclenché un tollé. “Normalement on regarde non seulement toutes les preuves trouvées sur les humains, mais aussi ce qui se passe chez les animaux, soit sur un rongeur dans un laboratoire soit dans la nature”, a rappelé Lisette Van Vliet, de l’Alliance Santé et Environnement HEAL, un collectif de 70 ONG. “C’est désastreux”.

“Toute possibilité de faire ce qu’on fait depuis des décennies dans la gestion des produits chimiques toxiques est effacée”, s’est-elle alarmée. Pour elle comme pour l’eurodéputée Verts-ALE Michèle Rivasi, cette définition fait des humains “des cobayes”.

“UE pionnière”

“L’UE est pionnière dans la définition du perturbateur endocrinien”, s’est de son côté défendu le commissaire européen à la Santé Vytanis Andriukaitis.

Les substances nocives identifiées sur la base de ces critères seront interdites, sauf en cas d'”exposition négligeable” dans le cas des pesticides. Une précision qui a également fait tiquer les ONG.

La proposition présentée mercredi par la Commission européenne doit encore être validée par les Etats membres. Elle sera soumise en bout de course au Parlement européen.

Inaction de l’UE critiquée

L’association européenne de l’industrie phytosanitaire (ECPA) estime, de son côté, dans un communiqué que les critères ne font pas la distinction “entre les substances qui sont vraiment nocives et les autres qui ne posent aucune menace à la sécurité des humains”. L’association compte parmi ses membres BASF, Bayer, Dow AgroSciences, Syngenta ou Monsanto.

L’exécutif européen était sous le feu des critiques depuis plusieurs années. Ces dernières lui reprochaient son inaction pour préciser ces critères, alors que l’OMS avait publié sa définition dès 2002. En décembre 2015, la justice européenne avait rappelé Bruxelles à ses obligations, deux ans après la date promise par la Commission pour la publication de ces critères.

L’ONG anti-lobby Corporate Europe Observatory et la journaliste indépendante Stéphane Horel ont explicitement attribué ce retard à “une campagne massive du lobby de l’industrie” de la chimie, selon une note publiée au début du mois.

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