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Les Rohingyas réclament “justice” un an après leur exode massif

Des milliers de réfugiés rohingyas ont manifesté dans les immenses camps de réfugiés du Bangladesh à l'occasion du premier anniversaire du début d'un exode sans précédent de Birmanie voisine. KEYSTONE/EPA/MONIRUL ALAM sda-ats

(Keystone-ATS) Des milliers de réfugiés rohingyas ont manifesté samedi pour réclamer “justice” à l’occasion du premier anniversaire de leur exode massif. 700’000 d’entre eux ont fui la Birmanie pour d’immenses camps de la région de Cox’s Bazar, dans le sud-est du Bangladesh voisin.

Samedi, des milliers de Rohingyas ont voulu marquer ce “jour noir” en marchant pacifiquement et en se rassemblant autour des slogans: “Nous demandons justice à l’ONU”. Dans ce qui est désormais le plus grand camp de réfugiés de la planète, avec près d’un million de personnes au total, le chaos de l’automne 2017 a accouché d’une mer de cabanons de bambous et de bâches où règnent désespoir et misère absolue.

Dans des rassemblements surprise et rarissimes dans ces camps surveillés de près par les autorités du Bangladesh, une foule de Rohingyas est sortie samedi de ses cahutes et s’est jointe à des manifestations et marches pacifiques pour commémorer un “jour noir”. Environ 40’000 personnes ont participé à ces congrégations, selon des estimations de la police locale.

“Sauvez les Rohingyas”

Le 25 août 2017, des attaques par des rebelles rohingyas déclenchaient une vague de répression de l’armée birmane à l’encontre de la minorité paria. Cette campagne militaire a provoqué des déplacements de populations d’une magnitude jamais vue dans cette région pourtant enferrée dans un cycle sans fin de haine et de violences intercommunautaires depuis des décennies.

Au Bangladesh, des manifestants arboraient des foulards marqués “Sauvez les Rohingyas”, d’autres agitaient des drapeaux. “Plus jamais: jour du souvenir du génocide rohingya. 25 août 2018”, proclamait une bannière sur une colline du camp de Kutupalong.

Impasse

Dans les attroupements, la tristesse se mêlait de colère pour cette population bloquée dans l’impasse des camps de réfugiés. Malgré un accord de rapatriement entre la Birmanie et le Bangladesh en fin d’année dernière, le processus est actuellement au point mort. Moins de 200 Rohingyas ont franchi la frontière dans l’autre sens.

“Je suis maintenant inquiète pour l’avenir de mon fils”, a témoigné Rachida Begum, dont le dernier né âgé de huit mois est venu au monde dans le camp. “Nous avons peur. Il n’y a pas d’éducation ici et pas d’espoir d’en avoir là-bas non plus (…) Je ne vois pas d’avenir ici et il n’y en a pas là-bas non plus”, poursuit-elle, évoquant son pays d’origine, où les Rohingyas ne sont pas reconnus comme citoyens birmans.

Double langage

La dirigeante birmane Aung San Suu Kyi, très critiquée pour la gestion de cette crise, a rejeté cette semaine la responsabilité de l’échec du rapatriement sur Dacca, qui selon elle “doit décider de la rapidité” avec laquelle les réfugiés pourront rentrer.

Ce double langage diplomatique, les retards multiples, les appels à une enquête de la Cour pénale internationale et les craintes de nouvelles violences rendent plus incertaine que jamais la perspective d’une résolution de la crise. “Des décennies passeront peut-être avant qu’ils puissent retourner en Birmanie, si jamais ils le peuvent”, a déclaré dans un communiqué Pavlo Kolovos, chef de la mission de Médecins sans frontières (MSF) au Bangladesh.

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