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Mai 68: La goutte d’eau qui fait déborder le vase au Tessin

En mars 1968, les revendications estudiantines culminent avec l'occupation, durant trois jours, de l'aula de l'Ecole normale de Locarno, par 300 élèves (archives). KEYSTONE/PHOTOPRESS-ARCHIV/STR sda-ats

(Keystone-ATS) Vendredi 8 mars 1968, M. Speziali veut confirmer son statut de syndic de Locarno lors des élections communales. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

Le soir même, durant une réunion en internat, les jeunes, menés par le clan, votent l’occupation de la grande salle numéro 20 de l’Ecole normale. Elle commence dès le lendemain matin.

Ils sont quelque 200 au début, mais le nombre augmente ensuite pour atteindre plus de 300. “Nous étions tous ensemble dans le même espace, mais je me rappelle ce grand silence et ce respect. Notre contestation était très différente du chaos de Paris”, raconte une ancienne contestataire. Et c’est toujours ce “grand silence” qui est bien présent dans les souvenirs quelque peu flous de l’étudiant de 17 ans.

“Il s’agit d’une action à la fois libératoire et très bien organisée”, explique Mauro Stanga. Les participants se déclarent “Costituente” (constituante). Ils participent à des “commissions de travail”, débattent pour définir leurs revendications avant de rédiger des communiqués de presse.

Mardi 12 mars, c’est la fin de l’occupation. Quelque 900 étudiants réunis dans la salle de gym de l’Ecole normale adoptent une charte qui contient leurs revendications. Elle demande une réforme de la “Magistrale”, la création d’un parlement estudiantin avec les mêmes droits et devoirs que le plenum des profs ainsi qu’une séparation nette entre l’école et l’internat.

“Ce furent des journées de vraie maturation, plus en trois jours qu’en 20 ans d’éducation”, résume l’ancienne contestataire.

“Dans l’aula 20, on a appris à penser”, écrivent les étudiants à l’époque. “Aussi à agir dans une société vraiment démocratique. Chacun pouvait parler, donner son point de vue. La personnalité de chaque personne était respectée. Personne n’avait plus de pouvoir que les autres”.

Cinquante ans plus tard, “entendre ces paroles me donne la chair de poule”, confie l’ancienne contestataire. “Ces valeurs sont encore bien vivantes en moi”.

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