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Markus Wild: “Le rapport entre l’homme et l’animal se modifie”

(Keystone-ATS) Le véganisme est à la mode et les droits des animaux ont le vent en poupe: pour le professeur de philosophie à l’Université de Bâle Markus Wild, un changement de paradigme est en cours dans la relation entre l’homme et l’animal.

En cause, l’effondrement de la conception de l’Homme comme “la couronne de la création”. “Comme tous les animaux, l’être humain peut s’expliquer par la biologie de l’évolution”, indique le Pr Wild dans la dernière édition du magazine “Uni Nova” de l’alma mater bâloise.

Comme tous les animaux, l’humain dispose de qualités qui lui sont propres: une communication complexe, des compétences sociales et des possibilités considérables d’influer sur son environnement. Mais selon Markus Wild, une différence décisive qui distinguerait l’homme des animaux, comme par exemple la rationalité, n’existe pas.

Pour le philosophe animalier, le monde occidental est face à un changement de paradigme: des animaux qui il y a 100 ans étaient exterminés jouissent aujourd’hui de la protection de l’Etat, et des personnes manifestent par milliers pour une égalité des droits morale et légale entre les animaux et les humains.

Force intellectuelle

“Sur l’ensemble du globe, de tels processus sont observés”, poursuit le Pr Wild. En Argentine, un tribunal a récemment jugé que la détention d’un orang-outan était une privation de liberté.

Bien que ne représentant que 5% environ de la population en Suisse, végétariens et véganes sont de plus en plus considérés comme une importante force intellectuelle. “Au 20e siècle, hormis le marxisme, aucun autre courant philosophique ne s’est répandu aussi fortement dans la société”, note le philosophe.

Pour le Pr Wild, lui-même végétarien, l’éthique dans ce domaine est “une réaction à notre manière de traiter les animaux”. Le philosophe, qui emmène son chien Titus dans ses cours à l’université, réfléchit avec des comportementalistes à de nouveaux concepts permettant de décrire la communication animale.

Les poissons aussi

Il est en effet largement démontré que les grands singes pensent, ressentent de la douleur et se communiquent des intentions. Mais ce n’est pas tout: en 2012, un rapport de la Commission fédérale d’éthique pour la biotechnologie dans le domaine non humain (CENH) arrivait à la conclusion qu’on ne peut pas exclure que certaines espèces de poissons soient dotées de sensibilité.

Membre de la CENH, Markus Wild note que les poissons disposent de toutes les caractéristiques physiologiques nécessaires pour ressentir de la douleur et, d’un point de vue philosophique, ne se distinguent donc guère des mammifères. Leurs capacités cognitives ont été de mieux en mieux documentées ces dernières années. Conséquence: il ne mange plus de poisson.

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