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Nouvelle méthode de datation de restes humains utilisée en Suisse

Sandra Lösch, de l’Institut des sciences forensiques de l’Université de Berne, a contribué avec ses collègues neuchâtelois à éclaircir ce cas. L'enquête est toujours en cours. UNIBE/Manu Friederich sda-ats

(Keystone-ATS) Une équipe internationale dirigée par l’Université de Neuchâtel (UniNE) s’est penchée sur des restes humains découverts dans une forêt du Plateau suisse. A l’aide d’une nouvelle méthode, les scientifiques sont parvenus à identifier la victime et dater son décès.

Le Laboratoire de biodiversité du sol de l’UniNE et l’Institut des sciences forensiques de l’Université de Berne, ainsi que le Laboratoire d’acarologie de l’Université de Reading (GB) et le Real Jardín Botánico de Madrid (E) ont rassemblé leurs efforts pour tenter de reconstituer ce crime.

Cette recherche faisait également partie du doctorat de la première auteure de l’article, lldikò Szelecz, une thèse qu’elle a soutenue en début d’année à l’UniNE, a indiqué cette dernière lundi dans un communiqué.

En combinant diverses informations tirées de l’analyse au carbone 14 des os et des cheveux, de la chimie du sol et des organismes présents sous le cadavre (acariens, vers nématodes, et micro-eucaryotes), les spécialistes ont déterminé que les restes du défunt se trouvaient depuis plus d’une année sur le lieu de la découverte.

L’analyse des os et des comparaisons d’ADN ont permis d’identifier la victime. Il s’agit d’un jeune homme qui avait été vu vivant 22 mois avant la découverte de ses restes.

Résultats concordants

“Le fait que plusieurs méthodes aient donné des résultats concordants sur l’âge du cadavre nous conforte dans nos conclusions”, note Edward Mitchell, directeur du Laboratoire de biodiversité du sol, cité dans le communiqué.

En particulier, l’analyse des acariens a révélé que le corps aurait été entreposé dans un milieu confiné, avant d’être déplacé. Les chercheurs ont en effet identifié les restes d’une importante population de l’acarien Sancassania berlesei, qui se complaît dans des milieux saturés d’humidité.

Cela tend à indiquer que le cadavre a été conservé pendant une période prolongée – estimée entre 8 et 12 mois – dans des vêtements, des sacs ou un conteneur fermé, écrivent les scientifiques. Il a ensuite vraisemblablement été transporté en forêt et brûlé sur le lieu où il a été retrouvé.

Nouveaux développements

“De nouveaux développements technologiques ont révolutionné notre perception de la diversité microbienne, qui dépasse de loin celle des animaux et des plantes”, relève Enrique Lara, ancien chercheur à l’UniNE et actuellement à Madrid, co-auteur de ces travaux.

“Ces méthodes peuvent être appliquées dans les sciences médico-légales pour établir de nouveaux bioindicateurs, c’est-à-dire des témoins microbiens qui sont associés à différentes étapes de la décomposition d’un cadavre et peuvent ainsi fournir des informations sur la date du décès”, poursuit le spécialiste.

C’est la première fois que des analyses de vers nématodes et de la diversité des micro-eucaryotes (champignons et protistes) du sol ont été appliquées dans une instruction sur un homicide présumé.

Cadavres de cochons

“Nous avons développé ces méthodes en étudiant la décomposition en forêt de cadavres de cochons”, indique Edward Mitchell. “Nous avons ainsi rassemblé des connaissances complémentaires qui nous ont permis d’établir un diagnostic”.

Depuis 2009, plus de 800 échantillons correspondant à différentes étapes de décomposition ont été analysés pour établir des méthodes d’évaluation d’intervalles post-mortem. Il s’agit d’une première mise en situation pour dater l’âge d’un cadavre humain.

Au plan judiciaire, le cas n’est pas encore résolu: les investigations contre inconnu se poursuivent et l’accès aux données est limité. Le cadavre a été retrouvé en partie carbonisé dans une forêt à une altitude de 400 à 450 mètres. Ces travaux sont publiés dans la revue Scientific Reports.

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