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Pérou: le clan Fujimori vise un retour au pouvoir

Candidate pour le parti Fuerza Popular (droite), Keiko Fujimori, 41 ans, est depuis des mois en tête des sondages. Mais les résultats du 2e tour de l'élection présidentielle au Pérou pourraient êtreau final très serrés. Keystone/AP/RODRIGO ABD sda-ats

(Keystone-ATS) Les Péruviens votaient dimanche au second tour d’une présidentielle serrée qui pourrait sceller le retour au pouvoir du clan d’Alberto Fujimori par le biais de sa fille Keiko. L’ex-chef de l’Etat est lui incarcéré pour crime contre l’humanité.

Dans ce pays andin où le vote est obligatoire, 23 millions d’habitants ont été appelés aux urnes à partir de 08h00 (15h00 suisses) et jusqu’à 16h00 (23h00 suisses). Les premiers résultats étaient attendus vers 21h00 (04h00 du matin lundi).

Candidate pour le parti Fuerza Popular (droite), Keiko Fujimori, 41 ans, est depuis des mois en tête des sondages. Elle a toutefois récemment perdu de son avance face à son rival Pedro Pablo Kuczynski, ex-banquier de Wall Street de 77 ans et candidat de centre droit.

Les dernières enquêtes d’opinion montrent deux candidats au coude-à-coude, l’institut Ipsos créditant même M. Kuczynski d’une légère avance à 50,4% des intentions de vote contre 49,6% pour Mme Fujimori.

L’importance des régions rurales

“Cet écart pourrait se creuser dimanche si M. Kuczynski continue de progresser, comme il pourrait aussi se resserrer encore si les partisans de Fuerza Popular sortent massivement dans les régions rurales”, a commenté Alfredo Torres, président de l’institut Ipsos pour le Pérou.

Pour succéder à l’actuel président de gauche Ollanta Humala, au pouvoir depuis 2011 et qui ne se représente pas, “la course promet d’être serrée”, estime Adam Collins, analyste de Capital Economics.

Au premier tour, le 10 avril, Keiko Fujimori avait fini largement en tête, raflant 39% des suffrages contre 21% pour M. Kuczynski. Mais depuis, ce dernier a bénéficié d’un front anti-Keiko (comme on l’appelle dans le pays), obtenant notamment le soutien de Veronika Mendoza, arrivée troisième avec 18,74% des voix.

La fin rocambolesque du père

Derrière la candidate, plane l’ombre d’Alberto, le père, aujourd’hui âgé de 77 ans: descendant d’immigrés japonais, il a présidé le Pérou de 1990 à 2000 et son héritage continue de diviser le pays.

Une partie de la population le salue comme l’homme qui a combattu avec succès la guérilla du Sentier lumineux et dopé l’économie. Mais d’autres se souviennent des méthodes autoritaires de celui qui a commandité deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992, dans le cadre de la lutte contre cette guérilla.

Son bilan sulfureux lui a valu d’être condamné en 2009 à 25 ans de prison pour corruption et crime contre l’humanité, après une rocambolesque fuite au Japon puis au Chili.

Populisme contre technocratisme

Keiko Fujimori a pour sa part passé les cinq dernières années à chercher à gagner en influence au-delà des cercles de partisans de son père. Elle a réussi à renforcer la présence de son mouvement dans les provinces où elle avait été battue face au nationaliste Humala en 2011. Malgré tout, elle ne réussit pas à dissiper la méfiance de nombreux électeurs, alors même que certains de ses nouveaux collaborateurs sont éclaboussés par des scandales.

Mme Fujimori, dont le discours à la fois libéral et populiste plaît aux plus démunis, promet de s’en tenir aux règles démocratiques. Depuis son échec de 2011, elle a en outre pris ses distances avec son père. M. Kuczynski lui-même avait pris le parti de son actuelle rivale il y a cinq ans quand elle avait affronté M. Humala au second tour.

Si les deux candidats sont sur le plan budgétaire des conservateurs partisans du libéralisme, leur style et leur approche des dossiers diffèrent grandement. Le conservatisme de Mme Fujimori se teinte de populisme quand celui de M. Kuczynski est davantage empreint d’un style technocratique qui a empêché à sa campagne de “prendre” dans les provinces défavorisées et dans les quartiers populaires.

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