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Pas de procès pour le président brésilien qui promet ses réformes

Le sort de Michel Temer - premier président brésilien en exercice jamais mis en accusation - se trouve entre les mains des députés pour la deuxième fois en trois mois. KEYSTONE/AP/ERALDO PERES sda-ats

(Keystone-ATS) Le président brésilien Michel Temer a sauvé une nouvelle fois son mandat mercredi grâce à un vote des députés qui lève l’hypothèque de son procès pour corruption. Cette décision dégage aussi la voie pour ses réformes d’austérité réclamées par les milieux économiques.

La journée a été agitée pour le chef d’Etat de 77 ans. Alors que les députés participaient à un vote crucial pour son avenir, lui a dû être hospitalisé pour une “gêne urologique” une partie de la journée. “Je suis entier”, a déclaré le chef d’Etat en sortant de l’hôpital des forces armées à Brasilia en soirée, une probable référence à sa situation autant physique que politique.

Premier président brésilien en exercice jamais mis en accusation, Michel Temer avait été accusé par le parquet, avec deux de ses ministres, “d’obstruction à la justice” et de “participation à une organisation criminelle”. Mais par 251 voix contre 233, la Chambre des députés a décidé de ne pas le renvoyer devant la Cour suprême pour corruption.

C’est la deuxième fois en trois mois que ce cas de figure se présente. En août déjà, il avait échappé à la menace d’un premier procès pour corruption grâce aux députés – par 263 voix contre 227.

Réformes au menu

Grâce au vote de la chambre basse, Michel Temer, en dépit d’accusations très graves et d’un taux d’opinions favorables tombé à 3%, a les mains libres pour “remettre le Brésil sur les rails” avec des mesures d’austérité, avant la fin de son mandat. C’est ce qu’il avait promis en arrivant au pouvoir en août 2016 à la faveur de la destitution choc de la présidente de gauche Dilma Rousseff.

L’issue du vote de mercredi ne représente pas une surprise. Le nombre de voix favorables à un maintien au pouvoir de Michel Temer laisse penser qu’il disposera d’un soutien suffisant lors de sa dernière année de mandat pour mener à bien des réformes de fond dans la première économie d’Amérique latine.

Il veut mettre en oeuvre des réformes impopulaires mais réclamées avec insistance par les marchés, comme l’épineuse refonte des retraites en cours d’examen au Parlement. Pour que cette réforme soit approuvée, 308 voix sont nécessaires.

La réforme des retraites pourrait intervenir avant la fin de l’année, a déclaré mercredi une source gouvernementale. “C’est ce que Temer est venu faire. Il n’y a pas d’alternative”, a dit cette source à l’AFP, “ce sera le grand oeuvre du gouvernement”.

“Conspiration”

L’issue sans surprise du vote mercredi a tout de même choqué l’opposition. “C’est un résultat terrible pour le Brésil parce que la Chambre a fait obstruction à la justice”, a déclaré à l’AFP un député du parti Rede (gauche), Alessandro Molon.

“Cela empêche que quelqu’un réponde des crimes qu’il a commis, et ce quelqu’un c’est le président de la République, ce qui est gravissime”.

Président le plus impopulaire depuis la dictature militaire (1965-1985), Michel Temer s’est accroché au pouvoir malgré des scandales de corruption à répétition qui ont conduit à la démission de plusieurs de ses ministres. Accusé d’avoir orchestré un vaste réseau de corruption avec des caciques de son parti en échange de faveurs octroyées à des chefs d’entreprise, Michel Temer s’est dit victime d’une “conspiration”.

Après une manifestation de l’opposition de gauche à l’ouverture de la séance mercredi, il a fallu des heures avant que le quorum de députés soit atteint, l’opposition boycottant les débats pour empêcher Michel Temer de remporter la victoire annoncée.

32 milliards

Ces derniers jours, le chef de l’État n’avait pas ménagé ses forces, menant d’intenses tractations et recevant des dizaines de députés pour s’assurer que l’opposition ne parviendrait pas à rassembler les 342 voix (les deux tiers de la Chambre) nécessaires pour que la Cour suprême se saisisse de son dossier.

Il a fait des concessions de poids aux puissants lobbys en retirant l’aéroport de Congonhas de Sao Paulo de la liste des futures privatisations ou en abaissant les amendes prévues en cas d’atteintes à l’environnement, un geste fort à l’attention des 200 députés ruralistes.

Le quotidien O Estado de Sao Paulo a évalué mercredi à 32 milliards de réais (9,8 milliards de francs), le montant des gestes consentis envers les députés entre juin et octobre pour s’assurer leur soutien.

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