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Plusieurs pays de l’UE veulent réclamer à Apple leur part de gâteau

Le 31 août, l'exécutif européen avait sommé Apple de rembourser à l'Irlande plus de 13 milliards d'euros d'"avantages fiscaux indus", une décision que le groupe américain s'affiche déterminé à combattre (image symbolique). KEYSTONE/EPA FILE/SHAWN THEW sda-ats

(Keystone-ATS) Plusieurs pays européens ont indiqué samedi envisager de demander à Apple de leur rembourser une partie des impôts que le géant informatique américain aurait dû payer sur leur territoire. Parmi eux figurent l’Autriche et l’Espagne.

Ces annonces ont été faites lors d’une réunion des ministres des Finances de l’UE à Bratislava. Elles surviennent dans un contexte tendu pour le groupe américain, après une présentation jugée décevante mercredi de son cru annuel d’iPhone sur fond d’essoufflement des ventes du célèbre smartphone.

Interrogé lors d’un point presse, après une réunion avec ses pairs, pour savoir si Madrid comptait réclamer une part du “gâteau”, le ministre espagnol de l’Economie Luis de Guindos a déclaré: “nous allons l’analyser”.

Réduction des déficits

“Nous voulons savoir à combien cela pourrait s’élever. Car comme on est en train de faire un effort majeur pour réduire les déficits publics, il est essentiel que ces revenus ne soient pas perdus”, a-t-il ajouté. Après un déficit public de 5,1% du PIB en 2015, Madrid doit mettre les bouchées doubles pour faire tomber ce dernier sous les 3% du PIB en 2018, conformément aux règles européennes.

L’Autriche est aussi en train d'”examiner” la suite des opérations. “Si ce que la Commission européenne dit est légal, vous pouvez être sûr que moi, en tant que ministre des Finances je vais le réclamer”, a déclaré le grand argentier autrichien Hans Jörg Schelling.

Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, s’est montré plus prudent: “mes experts disent que nous ne savons pas ce que la Commission européenne a voulu dire”.

Attentes “prématurées”

Le 31 août, l’exécutif européen avait sommé Apple de rembourser à l’Irlande plus de 13 milliards d’euros d'”avantages fiscaux indus”, une décision que le groupe américain s’affiche déterminé à combattre et qui provoque la colère de Washington. Dublin compte faire appel de la décision de Bruxelles.

La Commission avait précisé que l’Irlande n’était pas le seul Etat concerné par ce remboursement. Si un pays s’estimait lésé d’avoir vu pendant des années le produit de ventes réalisées sur son territoire partir en Irlande pour échapper à l’impôt, il pourrait lui aussi réclamer sa part, réduisant mécaniquement le montant dû à Dublin.

Pour M. Schäuble, “les attentes qui ont été partiellement créées sont un peu prématurées”. “Il ne faut pas s’imaginer qu’il y a dès maintenant 13 milliards à se partager. La procédure devant la Cour de justice de l’UE va être extraordinairement compliquée et va durer”, a-t-il souligné.

“Il s’agit là d’une procédure pour aide d’Etat illégitime et pas d’une procédure pour fraude fiscale. Du point de vue irlandais, c’est légal, mais du point de vue de la Commission, c’est un avantage indu donné légalement à une entreprise”, a estimé le ministre français des Finances, Michel Sapin.

Construction plus possible

Présent à la réunion de Bratislava, le secrétaire général de l’OCDE, Angel Gurria, a relevé que “les détails techniques” de la décision de la Commission n’étaient pas connus. Quand ils le seront, “nous verrons si les parties concernées par cette affaire ont droit au pot”, a-t-il ajouté.

Pour le chef de file du combat mondial contre l’évasion fiscale, une telle situation ne peut plus se reproduire actuellement en Irlande ou ailleurs. “Car ce type de construction n’est plus possible”.

“Les compagnies internationales ont une obligation de payer des impôts et je pense que chacun d’entre nous devrait travailler ensemble pour être sûr qu’elles le fassent”, a martelé le Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, président de l’Eurogroupe.

En octobre 2015, l’américain Starbucks avait été sommé de rembourser jusqu’à 30 millions d’euros aux Pays-Bas, pour avoir bénéficié d'”avantages fiscaux illégaux”, une décision similaire à celle infligée à Apple. La Haye avait annoncé le mois suivant son intention de faire appel.

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