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Présidentielle dans le calme au Brésil – Les électeurs veulent du changement

De nombreuses files d'attente se sont formées dimanche pour la présidentielle au Brésil, ici à un bureau de vote de Rio de Janeiro. Keystone/AP/LEO CORREA sda-ats

(Keystone-ATS) Les Brésiliens votaient nombreux et dans le calme dimanche pour le premier tour de la présidentielle. Ils ont exprimé leur espoir d’un “changement” dans ce scrutin où Jair Bolsonaro, le candidat d’extrême droite, apparaît en position de force.

Les 147 millions d’électeurs avaient jusqu’à minuit heure suisse pour se rendre aux urnes, dans un pays où l’absentéisme est certes frappé d’une amende, mais minime. De nombreuses files d’attente se formaient encore dans l’après-midi.

“Le Brésil veut du changement”, a déclaré Roseli Milhomem, dans un bureau du centre de Brasilia, où elle va voter pour Jair Bolsonaro. “On en a assez de la corruption. Notre pays est riche, il ne peut pas tomber entre de mauvaises mains”. Rubens Dantas de Oliveira, retraité de 58 ans, a aussi voté pour l’ex-militaire : “Nous ne pouvons pas voter toujours pour les mêmes candidats, les mêmes partis. Il faut un changement général”.

Jair Bolsonaro, ex-capitaine de l’armée devenu un phénomène électoral depuis qu’il a frôlé la mort dans un attentat le 6 septembre, a voté en début de matinée à Rio. “Ça va se terminer aujourd’hui”, a-t-il assuré devant des journalistes. “Le 28 (octobre, date du deuxième tour), on va à la plage!”, a-t-il lancé. Un scénario qui fait trembler les démocrates dans le grand pays latino-américain, mais que certains analystes n’excluent plus.

Admirateur de Trump

Même sur la place Sao Salvador, un des fiefs de la gauche à Rio, certains électeurs affichaient leur enthousiasme pour Jair Bolsonaro. “Notre pays a besoin de changement, ça ne peut plus continuer comme ça”, affirme Terezinha Diniz. De nombreux électeurs voient en Jair Bolsonaro, 63 ans, un espoir tant les Brésiliens sont exaspérés par la crise économique, la violence et les innombrables scandales de corruption.

Député pendant 27 ans, ce catholique admirateur du président américain Donald Trump et adepte du port d’arme n’a jamais été impliqué dans une affaire de corruption et ses électeurs se recrutent dans toutes les couches sociales. Et aussi parmi les jeunes.

Outre une image d'”outsider” cultivée malgré une longue carrière politique, le candidat d’extrême droite a prospéré sur ce fort sentiment anti-PT d’une partie de la population. Celle-ci juge la formation de gauche responsable de tous les maux du pays, où la crise économique a fait près de 13 millions de chômeurs.

Denise Rangel, secrétaire de 59 ans, qui avait voté pour l’ex-président de gauche Lula en 2002, veut désormais faire barrage au Parti des travailleurs (PT) qui l’a “tellement déçue”. “Je ne suis pas une électrice convaincue de Bolsonaro, mais je suis convaincue que le PT ne peut pas revenir au pouvoir”, déclare-t-elle.

“Grand risque”

Le candidat du PT, Fernando Haddad, 55 ans, principal rival de M. Bolsonaro, a voté en milieu de matinée à Sao Paulo, ville dont il fut maire, entouré de militants chantant à plein poumon pour couvrir un concert de casseroles. “Le Brésil court un grand risque de fouler au pied 30 ans de conquêtes” sociales et démocratiques, a-t-il déclaré. Le second tour sera “l’occasion pour les Brésiliens de comparer les projets”.

“Nous sommes là pour défendre la démocratie contre le fascisme qui, de façon absurde, s’installe dans la mentalité des Brésiliens”, explique Maria Antunes, dans un bureau de vote à Sao Paulo.

Les instituts Ibope et Datafolha accordaient samedi soir à M. Bolsonaro, du Parti social libéral (PSL), 40 et 41% des intentions de vote, devant M. Haddad, (25%), 55 ans. Ce dernier a remplacé l’ex-président Luiz Inacio Lula da Silva, emprisonné pour corruption et inéligible.

Le duel qui se profile au second tour pour succéder au très impopulaire Michel Temer sera le résultat d’une attraction des électeurs vers les extrêmes, concomitante à l’effondrement du centre, notamment le grand parti PSDB de Geraldo Alckmin. Ciro Gomes (PDT, centre gauche) n’a que 13 à 15% des intentions de vote, alors qu’il est le mieux à même de battre M. Bolsonaro au 2e tour.

Les élections des gouverneurs et des assemblées des 27 Etats, des 513 députés de la Chambre basse et des deux tiers des 81 sénateurs étaient également prévues dimanche. Elles ne devraient toutefois pas transformer radicalement le paysage politique.

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