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Protection de l’enfant: obliger à dénoncer la maltraitance

L'obligation de dénoncer les cas de maltraitance sur les enfants doit être renforcée. Les sénateurs veulent éviter de laisser des cas dans l'ombre (image symbolique). KEYSTONE/CHRISTOF SCHUERPF sda-ats

(Keystone-ATS) L’obligation de dénoncer les cas de maltraitance sur les enfants pourrait être renforcée au niveau fédéral. Le Conseil des Etats soutient cette révision du code civil. Le National, qui avait refusé de justesse d’entrer en matière, devra se prononcer à nouveau.

Le but de cette révision est de mieux protéger les enfants contre les abus en unifiant la pratique au niveau national. Tous les professionnels qui travaillent avec des enfants, les personnes travaillant dans les domaines de la garde, de l’éducation, de la religion ou du sport, auront l’obligation de signaler les maltraitances ou soupçons.

Aujourd’hui, seules les personnes exerçant une fonction officielle, comme les enseignants ou les travailleurs sociaux, sont tenues d’annoncer les cas suspects.

Ce thème ne devrait pas être soumis à des règles différentes selon les cantons. Il y a actuellement trop de diversité. Il s’agit donc d’une harmonisation, pas d’une centralisation, a plaidé Fabio Abate (PDC/TI) au nom de la commission des affaires juridiques.

“Pomme avec le bour”

Les cantons devraient garder la main dans ce domaine. La sensibilité n’est pas la même partout, a affirmé Peter Föhn (SZ). L’actuelle obligation de dénoncer suffit. Et le projet de révision est trop vague, on risque de voir une augmentation de fausses dénonciations ou d’exagérations, selon son collègue de parti Hannes Germann (SH).

Certains cantons, comme Vaud et le Valais, connaissent une obligation de dénoncer depuis longtemps, y compris pour les médecins. “Nous risquons de nous retrouver ‘pomme avec le bour’ parce que nous allons déjà plus loin et ne pourrons plus le faire”, a reconnu Géraldine Savary (PS/VD).

Mais l’argument fédéraliste ne suffit pas, cela ne doit pas empêcher d’agir a admis la Vaudoise. Il faut donc accepter la révision et préciser la question de ces cantons plus tard.

Cas dans l’ombre

Au final, il faut donner la possibilité aux autorités d’intervenir. “Si nous ne faisons rien, nous abandonnons des enfants, nous laissons des cas dans l’ombre”, a dit Daniel Jositsch (PS/ZH). Dénoncer ne signifie en plus pas que le cas va être traité, mais cela permettra d’enquêter en cas de soupçons.

En 2014, 1400 enfants ont été admis à l’hôpital pour des maltraitances ou des abus en Suisse. La moitié avait moins de six ans, un tiers moins de deux ans, a rappelé la ministre de la justice Simonetta Sommaruga.

“Qui s’est penché sur ces cas avant que le drame n’arrive, qui a pu enquêter”, a-t-elle lancé. La révision ne permettra pas d’éviter tous les abus, mais on peut améliorer la situation pour quelques cas.

Au vote, ces arguments ont convaincu une large majorité des sénateurs. Seule une poignée de sénateurs UDC a voté contre.

Secret professionnel

La révision prévoit des exemptions dans l’obligation de dénoncer, notamment pour les personnes qui évoluent avec des enfants dans le domaine des loisirs – tels les entraîneurs bénévoles. Des exceptions seraient aussi prévues pour les personnes soumises au secret professionnel, comme les médecins, les ecclésiastiques ou les avocats.

Ces personnes pourraient de toute façon aviser des cas dont elles ont connaissance. Mais elles n’y seraient pas tenues absolument, afin de maintenir la relation de confiance avec la victime.

La Chambre des cantons a par ailleurs décidé de maintenir le droit en vigueur en ce qui concerne l’obligation de collaborer qui incombe aux avocats: le fait d’être délié du secret professionnel ne doit pas obliger ces derniers à divulguer des faits qui leur ont été confiés.

Retour au National

Au National, l’UDC et le PLR n’ont pas voulu du projet et ont combattu l’entrée en matière. Ils ont été suivis par 96 voix contre 88. Les députés devront se ressaisir du dossier.

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