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Rideau de fin pour le Giornale del Popolo, plombé par Publicitas

Le Giornale del Popolo, l'un des trois quotidiens tessinois, fait les frais de la déconfiture de Publicitas. KEYSTONE/KARL MATHIS sda-ats

(Keystone-ATS) Le journal tessinois Giornale del Popolo cesse de paraître dès vendredi, plombé par la faillite de Publicitas qui lui cause un manque à gagner de 400’000 francs. Quelque 30 employés sont touchés, pour lesquels aucun plan social n’est prévu.

Le diocèse de Lugano, propriétaire du journal, a indiqué dans un communiqué que la perte des recettes publicitaires due à la défection de Publicitas a contraint la société éditrice du journal à déposer jeudi même le bilan auprès du tribunal de Lugano.

Interrogée par la RSI, la rédactrice en chef Alessandra Zumthor a précisé que la déconfiture de Publicitas laisse un trou de quelque 400’000 francs (sur un budget total de 4,6 millions), qui est venu aggraver une situation financière déjà précaire. “Nous sommes tous choqués par la rapidité de cette faillite”, a-t-elle confié, précisant que les responsables du journal étaient à la recherche de “solutions alternatives” ces dernières semaines. Elle a lancé un nouvel appel à de potentiels repreneurs.

Le dernier numéro sortira vendredi avec un éditorial signé de l’évêque Valerio Lazzeri, a précisé Mme Zumthor. Le rideau de fin avait dans un premier temps été annoncé pour samedi dans le communiqué du diocèse.

Convoquée par l’évêque

La rédactrice en chef a été informée du dépôt de bilan jeudi matin après avoir été convoquée par l’évêque. Elle a ajouté que pour l’instant, le diocèse n’avait pas prévu de plan social.

Dans son communiqué, la curie a exprimé sa profonde gratitude au personnel pour son engagement “généreux et persévérant” durant de nombreuses années. Elle a précisé que des mesures étaient à l’étude pour atténuer les conséquences de cette disparition forcée sur la trentaine de collaborateurs concernés. Une réunion d’information est prévue prochainement pour le personnel.

Plus de liquidités

Dans une interview à la RSI, Mgr Valerio Lazzeri s’est dit “torturé” par la disparition du journal. Il a néanmoins souligné que le dépôt de bilan était devenu la seule issue possible, le GdP n’ayant plus de liquidités. “Il y avait le risque de faire travailler les gens à vide sans pouvoir les payer à la fin du mois”. L’évêque et éditeur a ajouté qu’un plan social mettrait le diocèse financièrement “à genoux”, avec un risque de faillite à la clé.

Fondé en 1926 par le diocèse de Lugano et de ce fait proche des idées de l’Eglise, le “GdP” – comme l’appellent les Tessinois – est l’un des trois quotidiens du canton avec le Corriere del Ticino (aussi de Lugano) et La Regione (Bellinzone).

Le Giornale del Popolo compte quelque 35’000 lecteurs pour un tirage dépassant les 10’000 exemplaires, selon les derniers chiffres de la REMP. Dans les années 1990 et 2000, il avait atteint jusqu’à 25’000 exemplaires.

Séparation avec le Corriere

Les quotidiens Giornale del Popolo et Corriere del Ticino, qui collaboraient depuis 14 ans dans les domaines publicitaire et éditorial, se sont séparés au début de cette année. Pour motiver ce divorce, Valerio Lazzeri évoquait des divergences concernant l’avenir. Le Corriere del Ticino demandait notamment que des coupes soient effectuées dans les effectifs du “GdP”.

Dans la foulée de la séparation, le Giornale del Popolo avait à nouveau confié la vente de ses espaces publicitaires à Publicitas. Auparavant, cette activité était assurée par MediaTI Marketing, l’agence publicitaire du groupe Corriere del Ticino. Ce dernier contrôle toujours 49% du “GdP”. Les 51% restants sont la propriété de l’évêché depuis 2004, selon le site du journal.

Suite à la récente défection de Publicitas, plusieurs titres, notamment romands, ont dû s’organiser rapidement pour assurer la continuité auprès de leurs annonceurs.

Tristesse et consternation

Le PDC tessinois a exprimé sa profonde tristesse de voir disparaître le Giornale del Popolo. Il regrette un nouvel appauvrissement du paysage médiatique tessinois et suisse, “qui perd une voix attentive aussi bien aux grands thèmes qu’aux petites réalités locales”.

Le syndicat impressum est lui choqué. Il déplore la perte d’un quotidien supplémentaire pour le Tessin, qui paie un lourd tribut du fait de sa situation minoritaire et de la crise des médias. Impressum est d’avis qu’il faut à tout prix trouver de nouvelles sources de financement du journalisme pour éviter de pareilles débâcles.

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