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Roms et policiers plaident pour des aires d’accueil supplémentaires

Les policiers sont souvent appelés à contrôler les aires d'accueil pour les gens du voyage, une tâche qui à l'origine ne fait pas partie de leur champ d'activité (archives). KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT sda-ats

(Keystone-ATS) Les Roms nomades qui viennent s’installer quelques mois en Suisse sont de plus en plus mal accueillis. Un nouveau rapport, publié mardi, appelle à la création urgente de nouvelles aires d’accueil. Un souhait partagé par les policiers.

Il faut compter avec 500 à 800 caravanes étrangères en Suisse entre mars et septembre. Ce nombre passe de 1200 à 1500 entre juillet et août. Mais ces nomades disposent seulement de quatre aires de transit, à Domat/Ems (GR), Kaiseraugst (AG), Rennaz (VD) et Martigny (VS), pour un total de 110 places pour caravanes. Une situation intenable, estime la Société pour les peuples menacés (SPM).

Les groupes roms sont de plus en plus contraints de se limiter à des “haltes spontanées”, soit des séjours de courte durée sur des terrains privés sans s’annoncer. Cette situation ajoutée à la discrimination dont ils font régulièrement l’objet génèrent de nombreux conflits, souvent amplifiés par les médias durant la période estivale, note la SPM.

Pas de volonté politique

Le manque de place de stationnement ne date pas d’aujourd’hui. En 2006, un rapport du Conseil fédéral estimait déjà qu’il manquait une dizaine d’aires de transit pour les gens du voyage en Suisse. Aujourd’hui, personne ne conteste ce déficit. Mais le manque de volonté politique des cantons et des communes empêche toute réalisation. Ainsi de nombreux cantons peinent à respecter le nombre d’emplacements légal à l’intention des gens du voyage suisses.

Une situation que déplorent les intéressés tout comme la police, selon le nouveau rapport sorti mardi. Selon les cinq policiers qui ont accepté de participer à l’étude de la SPM, il faut créer des lieux où les gens du voyage peuvent travailler. Ce n’est pas aux agents de police d’assumer les échecs politiques.

Selon eux, il faudrait aussi mieux former le corps policier à l’histoire, la culture et au mode de vie des Roms nomades. Car aujourd’hui, ce sont eux qui s’occupent la plupart du temps des contrôles et de la mise en place des infrastructures nécessaires aux gens du voyage. Ils notent également que la présence de Roms nomades n’engendre pas une augmentation de la criminalité.

Dix fois plus

Pour les Roms eux-mêmes, le rapport recense les réponses de 29 personnes âgées de 30 à 50 ans, toutes disposant d’un travail et sur la route entre six et neuf mois par année à travers l’Europe. Pour elles, la Suisse devrait disposer d’au moins 200 à 300 aires d’accueil, ce qui éviterait des occupations dans des champs d’agriculteurs. Chaque ville devrait en compter au moins une et les plus importantes de deux à cinq.

Les Roms nomades souhaiteraient être autorisés à séjourner au moins deux à trois mois. Ils demandent que les aires d’accueil ne pratiquent plus de discrimination entre gens du voyage de nationalité suisse ou étrangère. Car il existe au total une trentaine d’aires d’accueil en Suisse, mais beaucoup réservent leur place aux minorités nomades suisses, comme à Winterthour (ZH) ou Liestal (BL).

Si les emplacements étaient bien équipés (évacuation des eaux usées, toilettes, douches, place supplémentaire pour des travaux, conteneurs à ordures), les Roms interrogés seraient prêts à payer jusqu’à 15 francs par caravane et par jour pour leur séjour. Mais en l’état, ils jugent les prix suisses du séjour surfaits. Ils oscillent selon l’infrastructure entre 8 et 13 francs par jour et par caravane, contre un à six euros en France, pays jugé exemplaire en la matière.

Réduire les conflits

Pour la SPM, il est donc urgent de créer de nouvelles places d’accueil et d’intégrer dans ces décisions les Roms concernés. L’organisation demande aussi d’équiper les sites pour un séjour de plusieurs mois et de confier la gestion de ces aires à des privés plutôt qu’à la police. Elles plaident enfin pour des médiations assurées par les membres des communautés sintés et roms.

Le rapport a été rédigé dans le cadre du projet “Roms nomades en Suisse: information, médiation et sensibilisation”. Cette initiative, lancée par la SPM et le Verband Sinti und Roma Schweiz, vise à réduire les conflits entre les Roms nomades, les propriétaires fonciers, les autorités et la police en Suisse.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

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