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Rotterdam: le Roi n’est jamais mort, vive le Roi !

(Keystone-ATS) La “régence” est terminée: le Roi trône à nouveau.

Vainqueur 4-6 6-1 6-1 contre le Néerlandais Robin Haase en quart de finale à Rotterdam, Roger Federer redeviendra lundi, à 36 ans, no 1 mondial. Le plus vieux de l’histoire, cinq ans et 106 jours après avoir cédé la place (novembre 2012).

Le plus grand joueur de tous les temps est donc allé jusqu’au bout de son époustouflant retour qui, au sortir de six mois passés à se soigner (deuxième semestre 2016) et après quatre ans et demi de disette en Grand Chelem, l’a vu avaler deux fois l’Open d’Australie et une fois Wimbledon – entre autres. Jusqu’à déloger Rafael Nadal de son piédestal et dominer à nouveau ce classement ATP comme aucun “papy” avant lui (record d’André Agassi, no 1 mondial à 33 ans, pulvérisé).

Au cours des quinze dernières années, Federer a banalisé l’exploit, matérialisé l’impossible, sécularisé le fantastique. Sa carrière superlative, collection inégalée de titres, de trophées, de records, de gloire, d’amour, insinue une forme de facilité trompeuse. Une habitude: celle de voir le Maître trôner.

Pourtant cinq ans et cent-six jours: voilà le temps dont a eu besoin Roger Federer pour redevenir le Roi. Il avait déjà dû attendre plus de deux ans, entre 2010 et 2012. Preuve que la facilité n’est pas de ce monde du sport de très haut niveau où la meute vous dévore à la moindre baisse d’intensité. Depuis si longtemps homme à abattre, le Bâlois n’a pas été épargné par les autres. Il a été attaqué, griffé, ceinturé, mis à terre. Mais dévoré, jamais.

Parce que ce que fait le Maître, raquette en main, tient du génie. Pour réaliser ce qu’il réalise, Federer a besoin d’un corps profilé et totalement adapté (une statue pour son préparateur Pierre Paganini !). Cela passe par un travail acharné, ce travail lui seul qui, bien souvent, forge les champions.

Or rien de tout cela ne serait possible sans un mental en acier trempé de volonté et, aussi, de confiance en soi. Alors que nombreux étaient ceux qui ne le pensaient plus capable des plus grandes victoires, Federer, lui, savait.

On ne louera sans doute probablement jamais assez non plus l’intelligence de l’homme – pas que celle du joueur. Le Bâlois a plusieurs fois durant sa carrière réinventé son jeu, l’adaptant aux nouvelles contraintes des insolents régicides déclarés, notamment la puissance et le lift de Rafael Nadal et la défense sans failles de Novak Djokovic.

Il a aussi compris mieux que tout le monde la manière d’entretenir son outil de travail, ce corps qui, en comparaison de la concurrence, ne lui procure aucun avantage a priori, et qui s’articule autour du dos de monsieur tout le monde, couinant, coinçant, lâchant. Roger Federer, muscles et esprit en symbiose, a atteint l’Harmonie.

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