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Terrorisme et crises identitaires préoccupent les écrivains

L'ombre des attentats se projette également sur la rentrée littéraire en France (archives). KEYSTONE/EPA/IAN LANGSDON sda-ats

(Keystone-ATS) la rentrée littéraire qui débute jeudi en France est en phase avec un monde troublé. Le roman vertigineux de Karine Tuil aborde les crispations identitaires alors que l’écho des attentats résonne chez Laurent Mauvignier, Laurence Tardieu et Eric-Emmanuel Schmitt.

Quelque 560 romans sont annoncés en librairie entre le 18 août et le mois d’octobre. C’est 29 de moins que l’an dernier. Parmi cette pléthore de livres, on compte 363 romans français dont 66 premiers romans et 197 romans étrangers.

Parmi les romans ancrés dans le réel, “L’insouciance” (Gallimard) de Karine Tuil s’impose. Ce livre de plus de 500 pages entraîne ses lecteurs de l’enfer afghan à l’ambiance feutrée et cruelle des cabinets ministériels en passant par les banlieues en déshérence. A travers le destin de quatre personnages, Karine Tuil évoque les questions qui nous hantent à l’heure du repli identitaire et du terrorisme.

Après les attentats

Dans “A la fin le silence” (Seuil), Laurence Tardieu s’interroge sur “l’après”, suite aux attentats de Charlie Hebdo et à la prise d’otages de l’Hyper Cacher. Ecrit à la première personne, le roman raconte une quête pour retrouver “la joie intérieure”. D’autant, souligne la romancière, que “cela n’était qu’un début”. Le roman s’achève avant Nice et Saint-Etienne-du-Rouvray.

Fiction évidemment, “L’homme qui voyait à travers les visages” (Albin Michel) d’Eric-Emmanuel Schmitt imagine un attentat à la sortie d’une messe. Dans “Continuer” (Minuit), Laurent Mauvignier nous fait suivre les pérégrinations d’une mère et de son fils au Kirghizistan. Habilement construit, le roman nous replonge dans les rêves brisés, un jour de juillet 1995 à Paris, de cette mère perdue.

Avenir de cauchemar

L’avenir imaginée par la Belge Emmanuelle Pirotte dans “De profundis” (Cherche-Midi) est tout sauf serein. Le virus Ebola ravage la planète. A Bruxelles les extrémistes religieux tiennent le haut du pavé et massacrent indistinctement. Dans ce cauchemar, on suit une femme, sa fille mutique… et un fantôme. Hallucinant.

Prix Goncourt en 2004, Laurent Gaudé revient avec un des livres les plus puissants de cette rentrée. “Ecoutez nos défaites” (Actes sud) mêle des soldats d’aujourd’hui (au Proche-Orient) et d’hier (Grant, durant la guerre de Sécession, Hannibal marchant sur Rome et Hailé Sélassié assiégé par les troupes italiennes). Comment sauver l’humanité en chacun de nous, s’interroge Gaudé,

Jean-Paul Dubois

Chaque rentrée est également l’occasion de retrouver des plumes aguerries. Amélie Nothomb répond présente avec “Riquet à la houppe” (Albin Michel). Nina Bouraoui, prix Renaudot 2005, explique qu’elle a écrit “Beaux rivages” (JC Lattès), histoire d’une rupture amoureuse, “pour tous les quittés du monde”.

Cette année marque également le grand retour de Jean-Paul Dubois, prix Femina 2004. Il publie chez L’Olivier “La succession”, une chronique familiale où, lorsqu’on ne se suicide pas, on aime les chiens et les voitures anglaises.

Récemment élu à l’Académie française, Andrei Makine, prix Goncourt et Médicis en 1995, nous entraîne dans la taïga sibérienne avec “L’archipel d’une autre vie” (Seuil). Le roman se veut un hymne à la liberté.

Cannibales et meurtres

Prix Femina en 2005, Régis Jauffret propose “Cannibales” (Seuil) un roman épistolaire où une femme abandonnée et la mère de son amant volage mettent au point la façon de se débarrasser de l’infidèle. Histoire de meurtre encore dans “Babylone” (Flammarion) avec une Yasmina Reza qui prend plaisir à jouer avec nos nerfs tandis que Leïla Slimani donnera des cauchemars à tous les parents avec sa “Chanson douce” (Gallimard).

Roman ascétique, superbement écrit, “Le grand jeu” (Rivages) de Céline Minard, lauréate du prix du Livre Inter en 2013, propose une solution radicale face au dérèglement du monde: s’en détacher.

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