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Trois Irakiens condamnés en Suisse pour activités liées à l’EI

L'un des prévenus est devenu paraplégique à la suite de graves blessures subies en Irak. Keystone

C'est la première condamnation jamais prononcée en Suisse en lien avec les activités terroristes de l'Etat islamique (EI): trois des quatre accusés irakiens ont écopé vendredi devant le Tribunal pénal fédéral (TPF) de peines de prison allant jusqu'à quatre ans et huit mois.

Convaincu de la culpabilité des accusés – quatre Irakiens âgés d’une trentaine d’années – le Ministère public de la Confédération (MPC) avait requis des peines privatives de liberté allant jusqu’à sept ans et demi de prison contre deux des prévenus. 

Les peines prononcées par le tribunal sont inférieures à ces demandes. Deux des prévenus ont écopé de quatre ans et huit mois, le troisième devra purger trois ans et demi et le dernier a été acquitté. Un recours au Tribunal fédéral à Lausanne est “très vraisemblable”, a annoncé la défense.

Des mesures de sécurité exceptionnelles avaient été prises pendant la durée du procès, qui avait duré quatre jours. Elles ont été renouvelées lors du prononcé de la sentence.

“Pas le noyau dur”

Selon la Cour, l’un des deux principaux accusés, paraplégique à la suite de graves blessures subies en Irak, a bien entretenu des contacts directs avec un membre présumé de l’organisation EI.

Il a échangé avec lui des informations de coordination et doit être reconnu coupable de participation à une organisation criminelle. Agé de 29 ans, cet Irakien est en outre reconnu coupable d’infractions à la loi fédérale sur les étrangers (LEtr) pour incitation à l’entrée et au séjour illégal en Suisse.

Selon le président de la Cour, l’homme ne fait pas partie du “noyau dur” de la mouvance islamiste. Ses activités relèvent plutôt d’une “zone grise” dans laquelle évoluent les soutiens de l’EI.

Un autre Irakien, lui aussi condamné vendredi pour participation à une organisation criminelle et infractions à la LEtr, écope également d’une peine de quatre ans et huit mois de prison. Selon le verdict, cet individu de 34 ans a collaboré à l’implantation d’une cellule de l’Etat islamique en Suisse en ouvrant une page Facebook, soutenant ainsi la “machine de propagande” de l’EI.

Imam “incendiaire”

Un troisième Irakien est condamné à trois ans et demi de prison pour soutien à une organisation criminelle et infractions à la LEtr. A travers les réseaux sociaux, l’homme a soutenu l’activité criminelle de l’EI.

Un quatrième accusé, qui a exercé l’activité d’imam, est acquitté. Son soutien à l’EI n’ayant pu être prouvé, il recevra une indemnité de 1092 francs. L’homme avait été qualifié lors du procès d'”incendiaire” par la représentante de l’accusation.

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Bombe ou «pastèque»? 

Au terme du procès qui s’est déroulé au début du mois, la défense avait demandé que les quatre hommes soient acquittés des principaux chefs d’accusation. Rien ne prouve que les prévenus aient apporté leur soutien aux visées terroristes de l’Etat islamique, avait-elle plaidé.

Les thèses diamétralement opposées du parquet et de la défense s’étaient affrontées dès le premier jour du procès. Elles reposaient sur des interprétations divergentes de communications sur Facebook ou sur Skype. 

Pour le MPC, les propos incriminés prouvaient que les quatre Irakiens avaient tenté de faire venir en Suisse des personnes et du matériel pour préparer un attentat. Ainsi, dans leur langage codé, le mot «pastèque» utilisé sur Facebook signifiait bombe et «cuire du pain» préparer une bombe. 

Pour la défense, les propos incriminés n’avaient pas du tout le sens prêté par le MPC. Ainsi, selon l’avocat du principal accusé, les propos codés trouvaient leur explication dans la volonté qu’avait son client de transmettre à l’ancien président irakien Nouri Al-Maladi des informations relatives aux prisons secrètes du régime.

Procureur satisfait 

Le procureur général de la Confédération, Michael Lauber, s’est dit «satisfait» après le verdict . Devant la presse, il a souligné le rôle «essentiel» dans cette affaire joué par la coopération avec les Etats-Unis et l’accord signé en ce sens entre Berne et Washington (Operative Agreement).

Le procureur a aussi évoqué le sort incertain des condamnés à leur sortie de prison. Il faudra trouver des solutions car il est exclu de les renvoyer dans leur pays d’origine, en raison des risques jugés trop élevés.

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