
Abbaye de St-Maurice: une gestion « déficiente » des abus sexuels

L'Abbaye de Saint-Maurice (VS) a failli dans la gestion des abus sexuels qu'elle a abrités au cours des dernières décennies. Chargé de faire la lumière sur ce passé, un groupe de travail indépendant a constaté des "dysfonctionnements importants".
(Keystone-ATS) Ce groupe, dirigé par le procureur général neuchâtelois Pierre Aubert, a publié vendredi son rapport. Se basant sur les archives et des témoignages, il a listé « un nombre non négligeable » d’actes de violence sexuelle en tout genre, commis durant la période 1950-2022.
Confrontées à ces violences, l’Abbaye a longtemps adopté « une posture défensive » pour préserver sa réputation. Ses responsables ont tantôt tenté de « camoufler » les faits, par exemple en déplaçant des chanoines incriminés, tantôt essayé de « banaliser » ou « minimiser » ces abus.
Le groupe de travail souligne aussi le « laxisme » en matière de surveillance ou encore « un encadrement et un appui insuffisants » des membres de la communauté. Ce climat a pu favoriser « des comportements inadmissibles » et la récidive de certains chanoines, pourtant mis en cause à plusieurs reprises.
Violences multiples
Au terme de son enquête, le groupe de travail a dénombré 67 situations de violences sexuelles et au moins 68 victimes, dont 57 mineures. Commis entre 1950 et 2022, ces abus ont été attribués à 30 hommes, chanoines ou autres personnes liées à l’Abbaye.
Ce décompte ne permet toutefois pas de tirer des conclusions sur la réalité des violences. En raison du « silence des sources », archives absentes ou personnes préférant se taire, il est « hautement probable que beaucoup de situations » aient échappé au groupe de travail, reconnaît-il.
Il ajoute aussi n’est pas toujours possible d’affirmer que les faits se sont exactement produits comme ils ont été décrits.
Les abus rapportés sont divers. La majorité consiste en des sous-entendus sexuels, des attouchements, des actes d’exhibitionnisme ou encore des cas de séduction dans un rapport d’autorité. Pour les cas les plus graves, le groupe de travail mentionne des agressions sexuelles, des viols et des avortements forcés.
Ces violences se sont principalement produites à l’internat ainsi que lors d’activités pastorales ou colonies de vacances.
Prescription
Sur le plan pénal, le groupe de travail n’a identifié aucun cas qui n’aurait pas déjà été jugé ou qui ne serait pas prescrit. Une affaire reste en cours, qui ne concerne toutefois pas un chanoine mais un laïc relié à l’Abbaye.
A la connaissance du groupe de travail, cinq condamnations contre trois chanoines et un novice ont été prononcées depuis les années 1970. La plus grande partie des affaires a été classée pour insuffisances de charges ou en raison de la prescription.