Canicules, sécheresses, fortes tempêtes: ce qui attend la Suisse en matière de climat
La Suisse se dirige vers un climat plus chaud, plus sec et plus imprévisible, avec moins de neige et des précipitations plus abondantes. Voilà ce qui ressort des projections nationales sur le changement climatique publiées par les principales institutions scientifiques du pays.
Présentée la semaine dernière par l’Office fédéral de météorologie et de climatologie (MétéoSuisse) et l’Institut fédéral de technologie de Zurich (EPFZ), l’étudeLien externe dresse un tableau saisissant de l’avenir climatique du pays alpin.
Un réchauffement deux fois plus rapide
Les températures mondiales ont déjà augmenté d’environ 1,3 à 1,4°C depuis l’ère préindustrielle. En Suisse, ce chiffre atteint 2,9°C, selon les données de 2024.
Si le réchauffement mondial se poursuit sans contrôle jusqu’à 3°C, les scientifiques estiment que le pays pourrait connaître une hausse de température de 4,9°C — un scénario qui pourrait se concrétiser dès 2065 si les émissions ne diminuent pas fortement.
Davantage de chaleurs extrêmes
Parmi les quatre conséquences majeures, le rapport prévoit une augmentation des vagues de chaleur et des nuits tropicales, en particulier dans les zones urbaines telles que Lugano, Zurich, Genève et Bâle.
Dans un monde plus chaud de 3°C, le jour le plus chaud de l’été à Bâle pourrait atteindre 38,8°C, contre 34,4°C durant la période de référence 1991–2020. Les journées de chaleur extrême, qui ne se produisent actuellement qu’une fois tous les 50 ans, pourraient devenir jusqu’à 17 fois plus fréquentes. La ville de Zurich devrait connaître environ cinq fois plus de nuits tropicales par an, en moyenne.
Les régions de plaine et les zones urbaines devraient subir le stress thermique le plus important, mais les vallées d’altitude et les contreforts alpins pourraient également connaître des épisodes de chaleur prolongés qui étaient autrefois rares.
Des étés plus secs
Alors que les hivers pourraient apporter davantage de pluie, les étés deviendront nettement plus secs en Suisse, annoncent les scientifiques.
La hausse des températures, l’augmentation de l’évaporation et la baisse des précipitations estivales devraient assécher les sols du pays. Les sécheresses estivales ont déjà augmenté au cours des quatre dernières décennies.
Une sécheresse qui ne survenait auparavant qu’une fois par décennie pourrait désormais se produire trois fois plus souvent, avec une intensité en hausse de 44%. Le risque d’incendies de forêt devrait lui aussi croître fortement.
De violentes chutes de pluie
La Suisse doit toutefois s’attendre à une augmentation des fortes précipitations en toutes saisons, affirment les spécialistes. Avec la hausse des températures, l’intensité et la fréquence des pluies torrentielles — en particulier des orages courts, mais violents — devraient croître.
De tels épisodes pourraient devenir jusqu’à 30% plus intenses, les précipitations se concentrant de plus en plus sur de courtes périodes. De telles évolutions augmentent le risque de crues soudaines, de coulées de boue et de glissements de terrain.
La neige se retranche à plus haute altitude
La ligne de neige dans les Alpes suisses recule rapidement. La limite dite du zéro degré, où la pluie se transforme en neige, a déjà grimpé de plusieurs centaines de mètres depuis le début du 20ᵉ siècle et devrait encore s’élever de 550 mètres d’ici la fin du siècle, pour atteindre environ 1450 mètres en hiver.
Cela signifie davantage de pluie hivernale et moins de neige. Dans un monde plus chaud de 3°C, la proportion de chutes de neige diminuerait d’environ 25%, tandis que les précipitations pluvieuses doubleraient quasiment. L’enneigement naturel aux altitudes plus basses pourrait presque disparaître, avec des conséquences profondes pour l’économie du ski.
«L’atténuation est toujours importante»
«Il serait possible d’éviter la majeure partie du réchauffement futur à long terme — et donc nombre de ses conséquences — avec une politique ambitieuse d’atténuation du changement climatique et des émissions nettes mondiales nulles d’ici 2050», déclare Reto Knutti, chercheur en climatologie à l’EPFZ.
La Suisse a ratifié l’Accord de Paris en 2017 et s’est engagée à réduire de moitié ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, puis à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
Pour ses derniers objectifs intermédiaires, le gouvernement a annoncé en janvier que le pays devrait réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 59% en moyenne entre 2031 et 2035 par rapport aux niveaux de 1990, et d’au moins 65% d’ici 2035.
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Cependant, même avec des réductions drastiques des émissions, un certain réchauffement supplémentaire est inévitable et les sociétés devront s’adapter, avertissent les auteurs du rapport.
«Le réchauffement climatique peut, au mieux, être limité, mais pas inversé», affirment les spécialistes.
Commandés par le gouvernement suisse, les scénarios climatiques 2025 ont été élaborés par MétéoSuisse, l’EPFZ et le Centre de modélisation des systèmes climatiques (C2SM), avec la contribution du Centre Oeschger de recherche sur le changement climatique (OCCR) de l’Université de Berne et de l’Université de Lausanne, sous l’égide du Centre national pour les services climatiques (NCCS).
Ils actualisent les projections précédentes publiées en 2007, 2011 et 2018, et offrent la vision la plus détaillée à ce jour de l’avenir climatique de la Suisse. Si les principales tendances identifiées dans CH2018 demeurent inchangées (réchauffement continu, vagues de chaleur plus fréquentes et plus intenses, précipitations extrêmes accrues, étés plus secs et moins de neige en hiver), les projections 2025 prévoient un réchauffement plus élevé.
«Les nouveaux scénarios climatiques brossent un tableau plus concret des changements climatiques qui attendent la Suisse dans les prochaines décennies, a déclaré la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider, cheffe du Département fédéral de l’intérieur. Ils nous aident à évaluer l’évolution et à prévoir les mesures appropriées pour protéger notre environnement, nos villes et notre agriculture.»
Texte relu et vérifié par Virginie Mangin/ts, traduit de l’anglais par Pauline Turuban à l’aide d’un outil de traduction automatique
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