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Toujours en convalescence, le Rhin va mieux

Le 30 octobre 1998, le Rhin était monté de 7 m. 36 à Cologne. Keystone

Une délégation suisse, conduite par Philippe Roch, directeur de l'Office fédéral de l'environnement, participait lundi à Strasbourg à une Conférence ministérielle sur le Rhin. Voilà un fleuve qui revient de loin mais qui a toujours besoin d'être protégé.

Philippe Roch et sa délégation prenaient part en fait à deux réunions ministérielles distinctes, celle du matin avec les Etats du bassin du Rhin, et celle de l’après-midi avec les Etats signataires de la Convention pour la protection du Rhin.

Ce fleuve de 1’320 km de long, véritable artère vitale entre les Alpes et la Mer du Nord, est alimenté par un bassin versant de quelque 170 000 km carrés qui se répartit sur pas moins de neuf pays, à savoir cinq pays riverains (Suisse, Allemagne, France, Luxembourg et Pays-Bas) et quatre «affluents» (Liechtenstein, Autriche, Belgique sans oublier … l’Italie).

Les eaux du Rhin, qui approvisionnent 20 millions de personnes, se sont progressivement dégradées à partir de la fin du 19e siècle sous la pression de toutes sortes de développements – démographique, agricole et industriel – au point que, vers les années 70, certains le qualifiaient de «cloaque le plus romantique d’Europe».

En 1950, les Pays-Bas, bien plus concernés que d’autres puisqu’ils se trouvaient à l’extrémité de cet axe fluvial de plus en plus pollué, proposèrent aux autres pays riverains de mettre sur pied un organe de coopération. C’est ainsi que naquit la Commission internationale pour la protection du Rhin.

Un demi-siècle plus tard, et après plusieurs gros sinistres écologiques mémorables dont celui de Schweizerhalle à Bâle en 1986, ce fleuve revit. De la Suisse aux Pays-Bas, il a retrouvé les teneurs en oxygène dont il a besoin, la presque totalité des 45 espèces de poissons qui le peuplaient jadis y sont à nouveau présents.

Mais le Rhin contient encore beaucoup trop de métaux lourds, d’azote, de pesticides ou autres produits phytosanitaires polluant ses eaux de manière diffuse. Il y a encore beaucoup trop d’obstacles à la migration du poisson, du saumon en particulier.

Les défenseurs du fleuve ne sont pas encore au bout de leurs peines et c’était l’un des principaux objectifs des réunions de Strasbourg que de mettre en chantier un nouveau programme de développement durable, baptisé «Rhin 2020».

Les priorités portent aujourd’hui sur la restauration de l’écosystème du fleuve et de ses fonctions écologiques, sur la prévention des crues et la protection contre les inondations, sur la qualité de ses eaux y compris les nappes souterraines.

Tout cela s’applique à la Suisse dont deux bons tiers des eaux s’écoulent par le Rhin. «Côté pollution chimique et organique, nous dit Philippe Roch, directeur de l’Office fédéral de l’environnement, des forêts et du paysage, nous avons déjà atteint des objectifs tout à fait remarquables. Mais nous avons encore deux grosses inquiétudes, concernant l’une les pollutions diffuses, l’autre l’écosystème du fleuve.»

«Il y a encore beaucoup à faire pour que le Rhin contienne suffisamment d’eau. Il faut aussi lui redonner un cours naturel avec des rives sauvages, des zones alluviales qui servent à la fois ses qualités écologiques, le développement de sa faune et un environnement qui limite les risques d’inondations.»

En Suisse, le programme «Rhin 2020» devrait relancer une douzaine de projets de renaturation du fleuve là où ses eaux circulent librement, projets qui sont en préparation depuis plusieurs années mais qui ont pris passablement de retard.

Les subventions fédérales sont à la disposition des cantons, mais ceux-ci avaient jusqu’à présent d’autres priorités pour leurs propres cours d’eau.

Le message de Philippe Roch à ses homologues réunis à Strasbourg va cependant plus loin que l’énoncé de projets écologiques, puisqu’il devait leur rappeler que la Suisse entend coopérer pleinement avec les pays européens.

«Dans ce domaine, constate-t-il, on nous considère comme un État membre. Nous livrons toutes nos données, nous participons à tous les travaux, nous sommes un plein partenaire politique et technique de l’effort européen.» La politique suisse de gestion des eaux est d’ailleurs tout à fait compatible avec la toute nouvelle directive-cadre de l’Union européenne.

Et le Rhône? La Suisse oublie-t-elle cet autre fleuve qui lui s’en va vers le sud? Philippe Roch admet qu’il y a effectivement moins d’impulsions de ce côté-là en faveur d’une coopération franco-suisse.

Mais, ajoute-t-il, «j’ai l’intention, en privé, de demander à Dominique Voynet, le ministre français de l’environnement, s’il n’y a pas là matière à rapprochement. On pourrait en tout cas imaginer une collaboration plus étroite dans le bassin genevois.»

Bernard Weissbrodt

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