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Didier Burkhalter, le pragmatisme discret

Keystone

Le sénateur neuchâtelois a été élu mercredi à la succession du ministre démissionnaire Pascal Couchepin. Ce siège reste ainsi en main libérale-radicale (PLR/droite). Réalisme, authenticité, efficacité, ce sont là les qualités que cet économiste de 49 ans a fait valoir au cours de sa campagne.

Le 8 juillet dernier, Didier Burkhalter annonçait sa candidature à la succession de Pascal Couchepin. Il était ainsi le premier candidat à se lancer officiellement dans la course, ceci un mois à peine après la démission du ministre valaisan.

Une démonstration de courage à l’heure où aucun autre candidat n’était encore sorti du bois. Sous son ton déterminé, un brin d’hésitation était néanmoins perceptible.

Habitué à mesurer les risques, le Neuchâtelois était conscient de se déclarer alors que le Tessinois Fulvio Pelli, président du PLR, apparaissait encore comme le grand favori. Quant aux inconnues sur la stratégie des autres partis, elles étaient nombreuses.

Au cours de la campagne qui a suivi, Didier Burkhalter ne s’est jamais départi totalement de son attitude appliquée et un brin crispée, face aux objectifs et aux caméras surtout. Peut-être en la circonstance a-t-il envié en secret l’aisance verbale de son colistier lors de cette élection, l’avocat genevois Christian Lüscher.

Là où ce dernier a – comme d’autres candidats à la succession Couchepin – ouvert son album de photos privées au journal de boulevard Le Matin, cet économiste de 49 ans, marié et père de trois enfants, a lui proposé de publier à la place une réflexion de sa plume sur la distinction entre sphère privée et sphère publique.

Trop attaché à la chose publique pour verser dans la superficialité, Didier Burkhalter a tenu à donner au cours de sa campagne l’image d’un homme réaliste, réfléchi, efficace et cohérent. Quiconque d’ailleurs le chercherait sur Internet ferait chou blanc: il n’a ni site personnel ni profil individuel sur Facebook.

Promotion rapide

Mais cela ne l’a jamais empêché d’investir son énergie pour répondre aux défis de son temps. Dans son canton par exemple, il a négocié la conclusion d’un partenariat public-privé (PPP) pour que la ville de Neuchâtel puisse se doter d’un stade de football avec centre commercial intégré. Et tant pis pour ceux qui ont critiqué le gigantisme du projet.

Elu en 1991 au Conseil communal (Exécutif) de la ville de Neuchâtel, Didier Burkhalter a quitté son poste en 2005. Siégeant à la Chambre basse dès 2003, il a vite trouvé sa place dans les rangs du groupe PLR, où sa promotion a été rapide. En 2005, il est nommé à la vice-présidence du groupe radical aux Chambres et il réussit en 2007 le difficile passage au Sénat.

Au niveau des dossier fédéraux, le Neuchâtelois, dont le père était officier supérieur, est connu pour être un spécialiste des affaires militaires. Il s’est en outre beaucoup engagé pour l’instauration d’une alerte en cas d’enlèvement d’enfants. Approuvée par les deux Chambres, sa motion devrait déboucher sur la mise en place d’un tel système d’ici la fin de l’année.

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Concordance

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Qualités et défauts

Sous la Coupole, le Neuchâtelois est perçu, à droite comme à gauche, comme étant un politicien prudent et posé. Rusé, résumeront certains. Et si son tempérament discret et peu porté à l’utopie peut en irriter quelques-uns, beaucoup s’accordent à reconnaître ses compétences de médiateur.

Côté critiques, son manque de charisme lui a souvent été reproché par les médias au cours de la campagne. Mais sans que cela ne l’affecte vraiment. En politicien pragmatique, il a fait le pari du sérieux de l’authenticité. Une ligne que le Parlement a salué en l’élisant.

Au fil des votes mercredi, Didier Burkhalter s’est montré maître de lui-même. Même si son grand rival le démocrate-chrétien Urs Schwaller semblait plus détendu. Tout au plus a-t-il eu une sueur froide au troisième tour lorsque la présidente de la Chambre basse Chiara Simoneschi a mal prononcé son score, annonçant 40 voix au lieu de 80.

Le sort de la 5ème Suisse

Une fois désigné par l’Assemblée, il a souligné que son élection constituait «une chance et une invitation pour l’avenir». Se félicitant que les règles de la concordance aient été respectées, le nouveau conseiller fédéral a tenu son discours en français, mais a promis qu’il s’exprimerait à l’avenir également en italien, en allemand et en romanche.

Interrogé par swissinfo.ch avant son élection, Didier Burkhalter s’était montré attentif au sort de la 5ème Suisse. Tout en insistant sur le nécessité d’aborder les problèmes des écoles helvétiques à l’étranger ou de la représentativité de la 5ème Suisse sous l’angle concret, il avait relevé que le réseau des 700’000 Suisses expatriés méritait d’être mieux coordonné et exploité.

Devant la presse, Didier Burkhalter a par la suite déclaré que la campagne pour l’élection au Conseil fédéral avait été un «combat utile». Usant de la métaphore sportive, il a également parlé d’un «match de référence» en évoquant le débat «nécessaire» sur la représentation linguistique et la concordance.

Fidèle à lui-même, il a aussi parlé de «créer des majorités nécessaires à dépasser les blocages». Interrogé sur son style réservé par rapport au panache de son prédécesseur Pascal Couchepin, il a esquivé la question. «Un conseiller fédéral n’est pas élu pour montrer sa joie mais bien pour travailler pour le bien du pays», a-t-il ajouté.

Carole Wälti, swissinfo.ch avec les agences

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Mercredi, l’Assemblée fédérale a élu le 112e conseiller fédéral appelé à succéder au libéral-radical (PLR/droite) Pascal Couchepin.

Elle a porté à ce poste le Neuchâtelois Didier Burkhalter par 129 voix contre 106 à son principal rival dans cette élection, le démocrate-chrétien (PDC/centre droit) Urs Schwaller.

Le choix du Parlement évité au parti libéral-radical de subir un revers magistral en perdant un de ses deux sièges au gouvernement.

La composition culturelle du gouvernement reste quant à elle inchangée, soit 5 Alémaniques et 2 Romands. Il n’en aurait pas été de même si Urs Schwaller, bilingue mais de langue maternelle allemande, avait été élu.

Avec cette élection, Neuchâtel fait son retour au Conseil fédéral. Le Parlement a offert à ce canton, parmi les mieux représentés au gouvernement, son neuvième ministre en la personne de Didier Burkhalter.

A noter que le socialiste Moritz Leuenberger et le radical Hans-Rudolf Merz pourraient eux aussi annoncer leur démission avant la fin de la législature en 2011.

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