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Empoignade pré-électorale sur le cas Blocher-Roschacher

La présidente de la Confédération Micheline Calmy-Rey en conversation avec le ministre de la Justice Christoph Blocher. Keystone

A trois semaines des élections fédérales, le débat a donné l'occasion aux députés de rappeler leurs positions vis-à-vis du ministre de l'Union démocratique du centre.

Christoph Blocher a rejeté les accusations liées aux circonstances de la démission de l’ancien procureur de la Confédération. La présidente de la Confédération a appelé la classe politique à davantage de modération.

Sans surprise, le débat urgent organisé mercredi à la Chambre basse du Parlement sur l’affaire Blocher-Roschacher a tourné au dialogue de sourds. Chacun a campé sur ses positions, s’agissant tant des théories de complot que des reproches soulevés par la commission de gestion.

Trois semaines avant les élections fédérales, l’Union démocratique du centre (UDC / droite nationaliste) et la gauche ont imposé cette discussion – transmise en direct par la télévision – au motif que les Suisses avaient le droit de savoir de quoi il en retourne. Un souhait resté lettre morte, les interventions des représentants des partis et du gouvernement n’ayant pas apporté d’élément nouveau sur le fond de la polémique.

L’UDC n’a eu de cesse de voler au secours de Christoph Blocher pendant les trois heures qu’a duré le débat. Le rapport de la commission de gestion de la Chambre basse sur le fonctionnement des autorités fédérales de poursuite pénale participe du travail de sape visant à dénigrer et écarter le ministre de la justice, ont fait valoir ses élus.

La démocrate-chrétienne (PDC / centre droit) Lucrezia Meier-Schatz, présidente de la sous- commission à l’origine de ce rapport, «a allumé la bombe contre M. Blocher, mais plusieurs personnes, y compris au gouvernement, ont participé à sa fabrication», a accusé le député UDC Christoph Mörgeli.

Institutions discréditées

Les autres partis, camp rose-vert en tête, ont défendu la thèse inverse, estimant que l’UDC cherche seulement à détourner l’attention «des vrais problèmes». Et de saluer le travail de la commission de gestion. Face aux attaques de l’UDC, Lucrezia Meier-Schatz s’est elle aussi inquiétée du discrédit jeté sur les institutions.

Une analyse partagée par le PDC et le Parti radical-démocratique (PRD / droite), qui jugeait ce débat contre-productif. Mais leurs tentatives d’apaisement et de recentrage de la discussion sur la surveillance future du Ministère public de la Confédération (MPC) n’ont guère eu d’échos.

Pour sa part, Christoph Blocher a profité de son temps de parole pour s’élever une nouvelle fois contre les soupçons à son encontre. Il a longuement justifié son attitude à l’égard du MPC et de l’ex-procureur fédéral Valentin Roschacher.

Règles respectées

Le départ de M. Roschacher, décidé librement par l’intéressé, a eu lieu dans les formes, a répété le ministre de la Justice et Police. Celui-ci a aussi contesté avoir émis des directives dépassant ses compétences et porté atteinte à la séparation des pouvoirs.

Dans un cas, il a interdit au MPC d’organiser une conférence de presse, et ceci dans l’intérêt de la Suisse. Quant à ses contacts avec le président de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral Emanuel Hochstrasser, ils étaient nécessaires pour régler des questions de compétences entre cette instance et son département.

Et de réaffirmer sa conviction que même le MPC doit être soumis à un contrôle et que cette responsabilité ne saurait être partagée comme aujourd’hui. D’où la proposition, en consultation jusqu’au 21 décembre, de confier à l’avenir la surveillance au gouvernement uniquement.

Libre au Parlement d’opter pour une autre solution, a ajouté Christoph Blocher. Mais la création d’un organe de contrôle indépendant nécessiterait un appareil onéreux en termes financiers et de personnel.

Présidente peu locace

Dernière à s’exprimer, Micheline Calmy-Rey a été moins diserte, refusant de répondre aux questions orales des députés. La présidence de la Confédération a axé son intervention sur la dignité et la tolérance, appelant les politiciens à faire preuve d’un peu plus de réserve.

Et de regretter que les considérations électoralistes l’emportent dans un sujet aussi important et sensible que la surveillance du MPC. «Le complot n’existe que dans l’imagination de ceux qui espèrent en tirer avantage.» La socialiste a également pris la défense du gouvernement. «Je ne laisserai pas dire que le gouvernement est composé de comploteurs».

Pour le reste, Mme Calmy-Rey a récapitulé les différentes étapes de l’affaire. Le gouvernement se prononcera sur la future surveillance du MPC quand il aura les résultats de la consultation et les expertises du jurisconsulte Georg Müller.

swissinfo avec les agences

Depuis quelques semaines, le monde politique et médiatique suisse s’agite beaucoup au sujet du départ de l’ancien Procureur général de la Confédération Valentin Roschacher, du rôle qu’y a joué le ministre de la Justice, de la séparation des pouvoirs et de la surveillance du politique.

Le ministre de la Justice Christoph Blocher est accusé dans un rapport de la Commission de gestion (CdG) de la Chambre basse du Parlement d’avoir outrepassé ses compétences et de n’avoir pas respecté le principe de la séparation des pouvoirs. Il n’avait pas non plus informé judicieusement le gouvernement sur le départ de Valentin Roschacher.

Christoph Blocher rejette ces critiques. Aidé de son parti, l’UDC, il invoque la thèse d’un complot visant à faire capoter sa réélection au Conseil fédéral. Afin de prendre une décision dans cette affaire, le gouvernement s’est assuré les services du professeur Georg Müller qui fonctionnera comme jurisconsulte, chargé d’analyser le rapport de la CdG.

C’est pour faire la lumière sur ce cas que la gauche et l’UDC ont demandé un débat urgent à la Chambre basse du Parlement.

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