Caisses noires de la CDU: les banques suisses servaient de coffres-forts
Des banques suisses ont servi durant des décennies de coffres-forts secrets à la CDU allemande. Les sommes déposées alimentaient secrètement les comptes du parti. Un schéma similaire aux circuits de blanchiment de l'argent sale du crime organisé.
Des banques suisses, à Zurich et à Bâle notamment, ont servi durant des décennies de coffres-forts secrets à l’Union chrétienne-démocrate allemande (CDU). Des sommes d’origine diverse y étaient déposées à l’abri des lois et du contrôle des services de la République fédérale. Elles alimentaient ensuite secrètement les comptes du parti. Un schéma similaire aux circuits de blanchiment de l’argent sale du crime organisé.
C’est ce qui ressort de la conférence de presse de la CDU de la région de Francfort, particulièrement impliquée dans le scandale des caisses noires. La section a rendu compte des résultats de sa propre enquête sur le mécanisme des financements obscurs.
Quatre-vingt-quinze pour cent du mystère est éclairci, selon Roland Koch, ministre-président du Land de Hesse, la région de Francfort. L’Union chrétienne-démocrate du Land entretenait une double comptabilité depuis le début des années 80. Plus de 12 millions de dollars ont alimenté ses caisses à partir de comptes secrets ouverts en Suisse, à Zurich.
Les sources qui alimentaient ces comptes étaient «propres», assure Roland Koch. Elles provenaient des cotisations des militants, de dons de soutien ou de remboursements de frais de campagne électorale. Ces sommes n’en avaient pas moins été dissimulées en Suisse, afin de les soustraire aux lois sur le financement des partis édictées après le scandale Flick, au début des années 80!
A l’époque, la CDU était l’un des principaux bénéficiaires des fonds illégalement versés par des industriels. Ceux-ci en profitaient pour échapper à l’impôt. Elle avait donc décidé, en toute connaissance de cause, de persévérer dans l’illégalité.
Et la région de Hesse n’est pas un cas à part. On sait désormais que les comptes secrets de la CDU fédérale, à l’UBS de Zurich ou à la banque Sarasin de Bâle, remontent au tout début des années 70, au moins. Et les sommes qui y étaient déposées provenaient, elles, incontestablement du système de blanchiment d’argent mis en place par certains industriels allemands, dans les années 60, au profit de la CDU, notamment.
Ces comptes ont été mis en sommeil, durant les années 80, à la suite du scandale Flick. Puis réutilisés ensuite. Tous ces faits ont été confirmés ou révélés ces derniers jours par les hommes qui ont tiré les ficelles des finances du parti durant des décennies, dont Horst Weyrauch, l’homme de confiance d’Helmut Kohl. L’ancien chancelier supervisait les livres de comptes de la démocratie chrétienne, à Bonn, comme en Hesse.
Des révélations tellement énormes qu’elles peuvent aussi bien conclure le scandale que saper, pour de bon, toute confiance de l’opinion publique allemande dans la CDU.
Michel Verrier, Berlin
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