Controversée, Khalifa Airways se déploie en Suisse

Filiale de Khalifa Airways propriété d'un jeune milliardaire algérien, Antinea Airlines ouvre une nouvelle ligne Genève-Alger dès le 6 novembre.
Mais la presse française s’interroge sur l’origine de sa fortune et les pertes colossales de son groupe.
Deux fois par semaine, le mercredi et le vendredi, Antinea Airlines reliera Genève à Alger à bord d’un Airbus A 320. L’information est confirmée par Philippe Roy, porte-parole de l’aéroport international de Genève.
Précisons également qu’Antinea Airlines relie déjà, depuis le début de l’année, l’aéroport de Bâle-Mulhouse à trois villes algériennes. Elle a, en outre, obtenu le feu vert de l’Office fédéral de l’aviation civile pour l’exploitation de ces lignes, confirme son porte-parole Daniel Göring
Déjà desservie par Air Algérie
L’ouverture prochaine de cette nouvelle desserte Genève-Alger peut surprendre. D’autant plus qu’elle est déjà assurée par Air Algérie deux fois par semaine.
Mais, aucun responsable n’étant joignable, swissinfo n’a pu obtenir davantage d’explications de la part d’Antinea Airlines.
Quant au service des relations publiques de Khalifa Airways (dont Antinea Airlines est la filiale), il a longtemps ignoré l’ouverture même de cette nouvelle desserte.
Il est vrai que l’ensemble du groupe Khalifa doit faire face, depuis quelques jours, à une intense campagne médiatique en France.
«Qui se cache derrière cet homme d’affaires de 36 ans?», s’interroge le quotidien Libération qui a consacré les quatre premières pages de son édition de mercredi à ce nouveau milliardaire.
Opacité de l’actionnariat et fonds mal identifiés
En cinq ans, Rafik Khalifa, le nouveau «petit prince» du capitalisme algérien, s’est bâti un immense empire. Il emploie plus de 10.000 personnes et affiche un chiffre d’affaires de plus d’un milliard d’euros.
Devenu le premier entrepreneur privé d’Algérie («Moumen» pour les intimes) est actif aussi bien dans la banque, le transport aérien, la location de voitures que dans les produits pharmaceutiques.
Par ailleurs, il est devenu le premier sponsor de l’Olympique de Marseille, avec 3 millions d’euros. Et des stars comme Catherine Deneuve et Gérard Depardieu s’affichent volontiers à ses côtés. Bref, Rafik Khalifa est à la mode.
Mais ce n’est pas tout. Les services secrets français s’intéressent de plus en plus à lui, d’autant que l’homme d’affaires algérien est dorénavant domicilié à Paris.
Fils d’un ancien ministre de l’Energie
L’enquête des services secrets, publiée dans Le Canard Enchaîné de la semaine dernière, parle de «performances commerciales décevantes», de «résultats financiers non divulgués». Plus grave, il évoque un «actionnariat opaque» et des «fonds mal identifiés».
En fait, l’empire de Rafik Khalifa perdrait beaucoup plus d’argent qu’il n’en gagne. Ainsi, le coefficient moyen de remplissage des avions de sa compagnie est inférieur à 65 %. Et, toujours selon le même rapport, «il ne suffit pas à assurer l’équilibre financier de la compagnie».
Alors, d’où vient l’argent? «Pour la rue algérienne, la réponse ne fait pas de doute et entraîne dans les ténèbres du pouvoir militaire, avance le journal Libération. Là où se blanchissent les milliards de dollars de la rente pétrolière et gazière.»
D’ailleurs, le numéro deux de la compagnie aérienne n’est-il pas Abdelghani Bouteflika, le propre frère du président algérien?
Quant au père de Rafik, Laroussi Khalifa, c’est notamment lui qui a mis en place les services secrets algériens, avant de devenir ministre de l’Energie et de l’Industrie en 1962, et PDG d’Air Algérie en 1965.
swissinfo/ Ian Hamel avec Frédéric Burnand à Genève

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