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La lutte anti-terrorisme entrave le commerce

La lutte des Etats-Unis contre le terrorisme a des répercussions sur les exportations suisses. picswiss.ch

Les mesures de sécurité imposées par les Etats-Unis après les attentats du 11 septembre 2001 ont un impact négatif sur le commerce extérieur de la Suisse.

Un sénateur soleurois demande au gouvernement d’évaluer la situation et de donner un coup de pouce aux entreprises touchées.

La lutte contre le terrorisme impose des mesures de sécurité renforcées. Rolf Büttiker ne le nie pas. Par contre, le sénateur radical (droite) juge que les dispositions prises par les Etats-Unis entravent le commerce.

«Ce sont les petites et moyennes entreprises qui en souffrent le plus», explique à swissinfo Rolf Büttiker, qui vient de recevoir la réponse du Conseil fédéral (gouvernement) à son interpellation.

Et de citer l’exemple des contrôles douaniers sur les containers, destinés à empêcher l’entrée sur sol américain d’armes ou d’autres marchandises dangereuses.

Des contrôles dont les entreprises ne sont pas les seules à souffrir. Certains particuliers en ont fait l’expérience, en constatant que leurs paquets de Noël n’étaient jamais arrivés aux Etats-Unis.

Plus généralement, les critiques se font désormais entendre un peu partout dans le monde. Sous prétexte de lutte anti-terroriste, Washington serait en train de revenir à un protectionnisme dommageable aux échanges internationaux.

Tracasseries administratives

En décembre 2003, est entrée en vigueur la nouvelle loi américaine contre le bioterrorisme. Désormais, les entreprises du secteur alimentaire doivent obligatoirement déclarer tout ce qu’elles exportent vers les Etats Unis et même signaler à l’avance le détail de leurs livraisons.

A l’époque des discussions sur cette loi, le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco) l’avait déjà qualifiée de «déraisonnable et discriminatoire». La position de Berne n’a guère varié depuis.

«Nous continuons à croire que ces mesures sont excessives», confirme à swissinfo Franziska Zimmermann, du seco.

Même si les premières expériences montrent que les tracasseries administratives sont moins lourdes que ce à quoi on pouvait s’attendre.

Et la protection des données?

Rolf Büttiker soulève un autre problème: celui de la protection des données. Dans ce domaine, le gouvernement lui-même se dit peu satisfait des explications données jusqu’ici par les Etats-Unis.

«Nous ne lâcherons pas prise», a dit le président de la Confédération Joseph Deiss dans sa réponse à l’interpellation du sénateur.

Un des points d’achoppement est l’exigence posée par Washington, qui veut que des données soient fournies sur chaque passager qui arrive aux Etats-Unis par avion.

«Si ces données sont collectées, le risque existe qu’elles soient exploitées», relève Franziska Zimmermann. Le seco garde donc un œil sur l’affaire et essaye de régler le problème par la voie bilatérale.

L’OMC s’interroge

Même à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), on commence à se poser des questions.

Au milieu du mois de janvier, l’OMC s’est livrée à un examen de la politique économique américaine.

La Suisse et de nombreux autres Etats membres de l’organisation se sont dits inquiets des conséquences que les mesures prises par Washington peuvent avoir sur le commerce mondial.

Dans sa réponse à l’interpellation de Rolf Büttiker, le gouvernement rappelle, pour sa part, que la Suisse doit bien sûr soutenir la lutte internationale contre le terrorisme.

Toutefois, il reconnaît que de telles mesures pourraient avoir un effet négatif sur l’économie et les relations commerciales.

Protectionnisme pur et dur

Ces instruments ne doivent pas être utilisés abusivement pour justifier un protectionnisme bureaucratique ou administratif, estime le Conseil fédéral.

La Suisse demande donc aux Etats-Unis d’être attentifs à cette question et de réduire au maximum ces mesures qui peuvent avoir un effet négatif sur le marché.

Rolf Büttiker, lui, s’avoue un peu déçu. Il espérait que le gouvernement s’engagerait plus clairement pour l’économie suisse.

«Je ne veux pas réveiller un sentiment d’anti-américanisme, tient à préciser le conseiller aux Etats. Mais les règlements imposés par Washington ressemblent plus à un protectionnisme pur et dur qu’à toute autre chose.»

swissinfo, Rita Emch
(traduction: Alexandra Richard)

– Peu après le 11 septembre, le Congrès américain a accepté un paquet intitulé «Patriot Act», qui donne pratiquement carte blanche à l’administration Bush pour lutter contre le terrorisme.

– Depuis, Washington a introduit toute une série d’autres lois et règlements qui ont un impact sur le marché économique de plusieurs pays, notamment la Suisse.

– L’industrie alimentaire a été particulièrement touchée par les nouveaux règlements de douane. Les entreprises doivent obligatoirement déclarer tout ce qu’elles exportent vers les Etats-Unis et même signaler à l’avance le détail de leurs livraisons.

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