RETROSPECTIVE 1999: les multinationales suisses prises la main dans le sac
Amendes, enquêtes pénales, arrestations: cette année, plusieurs grandes entreprises helvétiques, à l’image du Credit Suisse Financial Products, ont eu maille à partir avec des juges étrangers. Nos entreprises se croyaient-elles au-dessus des lois?
Amendes, enquêtes pénales, arrestations: cette année, plusieurs grandes entreprises helvétiques, à l’image du Credit Suisse Financial Products, ont eu maille à partir avec des juges étrangers. Nos entreprises se croyaient-elles au-dessus des lois?
Au Japon, c’est le Credit Suisse Financial Products qui a perdu sa licence bancaire suite à des transactions douteuses sur des produits dérivés. Le tout sur fond de perquisitions et d’arrestation de l’ancien patron d’une filiale de la banque. Les mesures les plus sévères que les autorités nippones aient jamais prises à l’encontre d’une banque étrangère. Aux Etats-Unis et au Canada, c’est le géant pharmaceutique Roche qui a dû payer 1,2 milliard de dollars d’amende pour avoir mis en place dès 1989 un cartel des vitamines avec l’allemand BASF et le français Rhône Poulenc. En Australie, c’est ABB qui est visée pour une entente illégale sur les prix des transformateurs. Quant au géant bâlois Novartis, il est sous la menace d’un procès antitrusts concernant le marché des semences.
Financièrement, les sanctions n’auront pratiquement aucun effet sur les comptes de ces sociétés. Au niveau de l’image, en revanche, le coup est rude. Il faudra des années pour regagner la confiance des consommateurs.
La justice a frappé fort. Un signe qui montre que désormais les multinationales helvétiques n’ont pas intérêt à prendre trop de libertés avec les législations économiques. Peut-être pensaient-elles pouvoir pratiquer à l’étranger ce qu’elles ont fait à la maison en toute impunité pendant de nombreuses années. Car même s’ils sont désormais interdits, plusieurs cartels de fait subsistent encore en Suisse.
Ceci dit, nos sociétés sont-elles plus malhonnêtes que les autres? Probablement pas. En fait les entreprises suisses sont des proies faciles à épingler. Lorsqu’un gouvernement veut mettre de l’ordre dans un secteur, il s’attaque de préférence aux entreprises issues d’une nation dont il est sûr qu’elle ne réagira pas politiquement ou qu’elle ne cherchera pas à se venger. En cela, la Suisse est une cible idéale. Pendant la guerre froide, Berne jouait un rôle central d’intermédiaire entre les deux blocs. Mais depuis la chute du mur de Berlin, cette dimension stratégique s’est évanouie. La Confédération n’a plus de poids politique au niveau international. En marge de l’Union européenne, la petite Suisse est isolée, sans puissants alliés. Les multinationales helvétiques font alors office de boucs émissaires et servent d’exemples. Une façon de dire à l’ensemble de la branche: «Voyez ce qui va vous arriver si vous ne vous pliez pas aux règles». Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les diverses sanctions ont été très médiatisées par les Etats concernés.
Luigino Canal
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