Un grimpeur de Youtube inexpérimenté gravit seul le Cervin
Magnus Midtbo a fait le buzz sur internet avec la vidéo de son ascension du Cervin en solo, alors qu'il n'a pas d'expérience de la montagne. Il déconseille à quiconque de l'imiter, mais est-ce suffisant?
«Voici le Cervin, la montagne la plus dangereuse d’Europe, et j’essaie de l’escalader seul.»
C’est ainsi que débute la vidéo de 25 minutes de Magnus Midtbo. Il y documente son ascension de la montagne de 4478 mètres. «Je n’ai jamais rien fait de tel», précise-t-il.
Il admet lui-même dans sa vidéo être mal préparé. Bien qu’il pratique l’escalade sportive, il n’a aucune expérience en matière d’escalade sur glace.
Le youtubeur explique avoir tenté de fixer ses crampons juste avant son ascension, en regardant sur Internet comment faire. Et ce en sachant qu’il risquait une chute mortelle si les crampons ne tenaient pas.
Pendant son ascension, il doit lutter contre les effets de l’altitude: maux de tête, fatigue, perte de concentration… «Tout est mille fois plus difficile que d’habitude», dit-il.
De gros rochers dévalent la pente tout près de lui, et Magnus Midtbo peine à trouver le bon chemin. D’autres alpinistes le ramènent sur la bonne voie. «Le moindre faux pas pourrait facilement être fatal.»
Il y parvient tout de même finalement. «Oh mon Dieu. On a l’impression d’être sur le toit du monde», s’exclame-t-il. Une fois redescendu, il confesse regretter en quelque sorte d’avoir tourné cette vidéo, car il n’était pas bien préparé et avait sous-estimé le risque.
«Je ne veux pas que quelqu’un fasse la même chose», dit-il. Mais est-ce suffisant pour dissuader les autres?
Un exemple dangereux
Pour les professionnels comme Anjan Truffer, on voit bien sur la vidéo que Magnus Midtbo ne maîtrisait pas vraiment la situation. Anjan Truffer est chef des secours chez Air Zermatt. Il relève sur la vidéo que le grimpeur s’est écarté de la voie normale et a escaladé une fine arête escarpée.
«De telles situations sont dangereuses, déclare-t-il. Même un bon grimpeur peut avoir un accident. Si une prise ou un appui lâche, on se retrouve en bas.»
La plupart des gens qui regardent ce genre de vidéos ne sont pas aussi bons grimpeurs que Magnus Midtbo et peinent souvent à distinguer un professionnel d’un amateur. Cela pourrait pousser certaines personnes à se surestimer et à tenter de l’imiter, craint Anjan Truffer.
Négligence
Un tel acte n’a rien d’héroïque, mais relève de la négligence, souligne également Daniel Süess, professeur de psychologie des médias à l’Université de Zurich. «Ce n’est pas héroïque de prendre des risques qu’on n’est pas en mesure d’évaluer», affirme-t-il.
«Voir de manière répétée des initiatives aussi risquées bien se terminer peut renforcer l’idée que cela se passera bien pour soi aussi», avertit Daniel Süess. En outre, la recherche d’attention et la notoriété liée à une telle vidéo peuvent également inciter d’autres personnes à se lancer dans un projet dangereux.
Daniel Süess insiste sur l’importance d’informer sur les dangers comme ceux du Cervin. Bien que Magnus Midtbo l’ait fait à plusieurs reprises dans sa vidéo, cela reste ambivalent, selon le professeur.
La grimpeur a aussi reçu beaucoup de “likes” parce qu’il a fait quelque chose de risqué, d’excitant et d’héroïque. «S’il dit maintenant: ‘moi je le fais, mais vous, ne le faites surtout pas’, ce n’est pas forcément très efficace», souligne Daniel Süess.
Ce dernier rappelle qu’il est important de sensibiliser et de prévenir des dangers à plusieurs endroits et sur plusieurs canaux.
Sans expérience de la montagne, un homme et une femme ont voulu, mi-septembre, randonner jusqu’au Schilthorn dans l’Oberland bernois et filmer l’ascension en direct pendant plusieurs heures.
Au bout de dix heures, c’était fini pour la femme: elle a fait une crise de panique à un passage difficile, n’a plus pu avancer et a dû être secourue par un hélicoptère d’Air Glacier.
Traduit de l’allemand par Pauline Turuban à l’aide d’un outil de traduction automatique
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