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Un ouvrage historique lève le voile sur l’apparence des Bernois «ordinaires» d’autrefois

Josef Reinhard
Josef Reinhard, « Hanns Gebhardt Sechell, maître à Könitz, et Ju[ngfrau] Catharina, sa fille, à Candon Bern », 1790. Musée historique de Berne. Photo Stefan Rebsamen

L’historien Norbert Furrer a analysé des centaines d’avis de recherche datant du 18e siècle pour un livre. Il y montre à quoi ressemblaient les corps et les visages d'alors, ainsi que la manière dont ils étaient décrits. Une première surprise: à l’époque, les cheveux grisonnaient bien plus tard qu'aujourd'hui.

Dans le signalement de Johann Abraham Gruner datant de 1768, on peut lire qu’«il se distingue par ses jambes très bien dessinées.» Avant l’invention de la photographie, les avis de recherche étaient le moyen utilisé par la police pour retrouver les personnes criminelles. Ils contenaient donc de nombreuses descriptions physiques: couleur des cheveux, couleur des yeux, dents, cicatrices, démarche ou posture, par exemple.

«Femme imposante»

Ces avis de recherche ont servi de base au travail de l’historien Norbert Furrer. Ce dernier a rassemblé des caractéristiques allant de 1715 à 1800 et les a synthétisées dans des tableaux. Il a publié ses conclusions dans l’ouvrage Der Körper des gemeinen Mannes («Le corps de l’homme ordinaire»).

Les avis de recherche analysés proviennent de la région bernoise et concernent 663 hommes et 50 femmes. «Les femmes étaient apparemment moins criminelles que les hommes – ou alors elles se faisaient moins souvent prendre», remarque Norbert Furrer. À propos d’une femme, on peut lire par exemple qu’elle était «une femme grande et imposante d’environ 30 à 35 ans».

Même si ces avis de recherche portent sur des personnes criminelles, il ne s’agit pas d’individus marginaux, mais bien de représentants du peuple ordinaire, explique l’historien. «La plupart n’étaient pas de grands criminels, ils avaient simplement volé quelque chose.»

Du lait et des centimètres en plus

Les données recueillies permettent de se faire une idée de l’apparence probable de la population bernoise au 18ᵉ siècle. Certaines conclusions n’étonnent guère, comme le fait que les gens étaient alors plus petits qu’aujourd’hui. Les hommes mesuraient entre 1,60 m et 1,65 m en moyenne, les femmes environ 10 centimètres de moins.

Il existait cependant des différences régionales, liées à l’alimentation. Dans les régions productrices de lait, comme l’Obersimmental, les habitants atteignaient en moyenne 1,70 m, tandis qu’à Aarwangen – une région principalement tournée vers la culture céréalière – la taille moyenne n’était que de 1,59 m.

Avant l’invention de la photographie, le corps humain était «capté» par les mots – de manière souvent imagée, parfois brute. Les avis de recherche de la région bernoise montrent à quel point l’apparence pouvait être décrite avec détail et créativité. Quelques citations originales offrent un aperçu de la perception de la beauté, de la stature et des particularités à l’époque:

«… est de petite taille, d’environ 5 pieds de haut, large d’épaules, épais de jambes…»

Extrait du signalement de Nicklauss Hoffer, Biglen (1729)

«… beau visage bien charnu et bouffi, avec de grosses joues…»

Extrait de l’avis de recherche de Johann Abraham Gruner, Berne (1768)

«… une grande bouche et des dents bien rangées, des mains maigres […] un peu prompt dans ses paroles…»

Avis de recherche d’Emanuel Wagner, Berne (1736)

D’après les données recueillies, les hommes de la région bernoise au 18ᵉ siècle avaient les cheveux gris beaucoup plus tard et étaient moins chauves qu’aujourd’hui. Les raisons de ce phénomène sont liées à notre époque, précise Norbert Furrer.

Il est erronné de penser que nos ancêtres bernois étaient tous affamés. Dans les avis de recherche, environ 70% sont qualifiés de «corpulents» ou «gros», et seulement 30% de «moyens», «minces» ou «maigres».

Des sourires avec des trous

Autre surprise: dans 80% des avis, il est fait état de dents «blanches». L’hygiène dentaire n’était donc pas aussi mauvaise qu’on l’a longtemps cru? «Oui et non», répond Norbert Furrer. Car seule environ la moitié des dentitions étaient décrites comme «complètes».

Le corps a jusqu’ici été quelque peu négligé dans la recherche historique, estime l’historien. Pourtant, l’apparence permet de tirer certains enseignements sur l’état d’une société.

Norbert Furrer s’intéresse à l’époque moderne, ce qui signifie que sa période d’étude s’arrête à 1800. Il a toutefois déjà dressé un tableau rassemblant les caractéristiques relevées dans 1688 avis de recherche bernois datant du 19e siècle. Le travail préparatoire est donc fait, au cas où quelqu’un souhaiterait se pencher scientifiquement sur des «dents bien rangées» et des «jambes bien dessinées».

Traduit de l’allemand par Pauline Turuban à l’aide d’un outil de traduction automatique

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